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arrondies, qui sont mûres avant la destruction des feuilles & de la tige.

Feuilles D, au nombre de trois à quatre, assez semblables à celles du lys : elles partent directement de la racine, & elles sont droites, planes, simples & entières.

Racine A ; tubercule aplati d’un côté, sillonné pendant la fleuraison, couvert de pellicules noirâtres, & rempli d’un suc laiteux.

Port. La fleur paroît en automne ; elle s’élève de terre à la hauteur de trois à six pouces : unique, sort immédiatement de la racine ; les feuilles & les fruits paroissent au printemps.

Lieu, les prés, qu’elle infecte souvent. La plante est vivace.

Propriétés. Toutes les parties de la plante ont une odeur forte, piquante : celle de la racine est un peu aromatique ; sa saveur est très-âcre, caustique, causant à la langue, pendant quelques minutes, la perte du sentiment, avec une espèce de rigidité. La racine récente est un poison violent : l’émétique, surtout le lait chaud sont leur contre-poison ; les feuilles, les racines peuvent être employées extérieurement, mais rarement. Il n’est pas prudent de faire usage intérieurement de cette plante, quoique M. Storck s’en soit servi avec succès. Il faut avoir sa prudence pour en faire usage ; mais, pour éviter la tentation, je n’indiquerai pas le cas où ce célèbre médecin l’a employée, d’autant plus que plusieurs autres médicamens peuvent la suppléer.

On emploie la colchique pour empoisonner les loups, en la préparant avec d’autres substances, & du tout on en compose un appât. Au mot Loup, on trouvera une méthode plus simple & infaillible.

Plusieurs auteurs ont conseillé fort sérieusement d’arracher des prairies la colchique, parce que cette nourriture étoit nuisible au bétail : ils auroient dû dire, parce que les feuilles de la colchique occupent un espace qui seroit mieux employé par le sainfoin, le fromental, &c. L’odeur de la plante suffit pour détourner le bétail. J’ai mis exprès des bœufs dans un pré non fauché, & rempli de colchique ; l’animal a dévoré le foin, & n’a pas touché à la colchique. À l’extrémité de ce pré, j’ai fait couper très-ras le fourrage, & laisser la colchique intacte ; les bœufs ont brouté, comme ils ont pu, cette herbe rase ; & quoiqu’ils eussent passé la nuit sans fourrage, ils n’ont pas touché à la colchique. Voilà comme on se hâte de prononcer d’après l’analogie, & non d’après l’expérience.

Je suis porté à croire que la feuille de la colchique, desséchée avec le fourrage qui l’environne, & mêlée avec lui dans le grenier à foin, dans le râtelier, &c. n’est, en aucune manière, dangereuse, puisque j’en ai vu souvent qui a été mangée par le bétail, sans accident. Je crois encore que la qualité caustique de cette plante, tient à son eau de végétation, & que lorsque cette eau est entièrement évaporée, la plante ne possède plus aucune qualité vénéneuse. Il en est ainsi de la bryone, du manioque. (Voyez ces mots) Je suis donc bien éloigné de croire que la maladie sur les bêtes à cornes, qui régna en 1774, ait été occasionnée par la colchique.

M. Parmentier a démontré que les racines de colchique contiennent de l’amidon, mais qu’il faut l’extraire de la bulbe. Cette opération sera décrite au mot Pomme de terre.