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vation & fait naître l’inflammation : or, toute inflammation se termine ou par la résolution, & il ne se forme pas d’abcès, ou par la suppuration, & l’abcès se forme. Dès l’instant que l’abcès est ouvert, il prend le nom d’ulcère. (Voyez ce mot)

Les abcès extérieurs sont bien plus aisés à connoître, & bien moins dangereux que les abcès intérieurs. Les premiers ne siègent, comme nous l’avons dit, que dans les glandes & dans les chairs, tandis que les seconds ont leur racine dans le corps des viscères les plus nécessaires à la vie.

Les abcès intérieurs, à la suite des grandes inflammations, s’annoncent par des frissons vagues, par l’augmentation de la fièvre, de la douleur & de la chaleur : ils se forment ordinairement le vingtième jour d’une fièvre, à la suite de laquelle il n’a point paru d’évacuation sensible. Dans le cours d’une maladie & d’une convalescence, si quelques parties deviennent douloureuses, souvent on peut soupçonner qu’il s’y formera un abcès.

Les abcès intérieurs sont toujours très-dangereux : il faut que le pus trouve une issue, sans quoi le malade meurt ou suffoqué, ou des suites de la putréfaction : souvent on l’a vu se frayer une route loin des parties dans lesquelles il avoit porté ses ravages ; on a vu le pus de la matrice sortir par la poitrine, & quelquefois le pus de la poitrine se frayer une route par les urines, quoique les reins & la vessie n’aient point ressenti les premiers effets de sa présence.

C’est toujours d’après la connoissance des causes qui ont déterminé les abcès tant intérieurs qu’extérieurs, qu’il faut diriger le traitement.

Pour les abcès extérieurs, quand l’inflammation est très-forte, on fait une saignée pour diminuer l’inflammation ; on la réitère, si elle continue : on emploie les topiques émolliens ; (voyez ce mot) & quand l’abcès est mûr, il perce de lui-même : on favorise le dégorgement par les mêmes émolliens ; il faut entièrement rejetter tous les corps gras, tous les emplâtres, tous les onguens, qui, en bouchant les pores de la peau, bien loin de favoriser le travail de la nature, qui tend à pousser le pus au dehors, le font refluer dans la masse, & produisent, de la cause la plus simple, les effets les plus dangereux. Si nous pouvons déraciner le préjugé meurtrier qui domine sur cette partie de l’art de guérir, nous nous serons acquittés de cette dette importante que toute ame sensible doit payer à l’humanité. L’application de l’eau tiède est cent fois plus utile que tous ces onguens composés à grands frais, vantés & célébrés par l’ignorance & par la cupidité.

Il existe des abcès extérieurs qu’il faut ouvrir avant leur maturité, surtout ces abcès qui viennent aux doigts, & qu’on désigne sous le nom de panaris, de peur que le pus contenu dans des parties très-serrées, ne fuse le long des bras, & n’aille sévir sous l’aisselle & dans la poitrine même, comme l’expérience, malheureusement trop journalière, nous l’a démontré à la suite de l’application des corps