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pas cependant les deux que nous suivrons le plus ; il est un objet que nous ne pouvons & nous ne devons jamais perdre de vue, l’économie animale & végétale. Nous examinerons les effets de ce nouveau principe dans cette partie, après que nous aurons développé les moyens de le produire, ou plutôt de l’extraire & de l’obtenir des différentes matières avec lesquelles il est combiné, & examiné sa nature & ses propriétés.

Le nom d’air fixe paroît devoir convenir, en général, à toutes les substances aériformes que l’on retire de tous les mixtes : ainsi l’air inflammable, l’air nitreux, l’air marin, l’air alkalin, l’air déphlogistiqué, &c. sont autant d’airs fixes, ou qui étoient fixés dans différens corps ; mais nous désignerons spécialement sous le nom d’air fixe, celui qui s’émane des substances en fermentation ou en combustion, celui que l’on dégage des terres calcaires & des alkalis par les acides ou le feu, celui enfin qui paroît être le plus universellement répandu. Presque tous les savans lui ont donné un nom propre & analogue à quelques-unes de ses propriétés. Pour éviter toute confusion, & avoir une idée nette sur ce principe même par rapport au nom, nous allons rapporter les dénominations les plus connues. Van-Helmont a substitué le mot de gaz sylvestre à celui d’esprit sylvestre, que Paracelse & les anciens chimistes lui donnoient. Gaz sylvestre signifie esprit, vapeur sauvage, que l’on ne peut retenir. Boyle & Hales, le regardant comme de l’air purement & simplement, l’ont désigné sous celui d’air artificiel & d’air fixe que Priestley lui a conservé. M. Macquer, ne le considérant que sous le rapport de ses effets, & son effet le plus frappant étant son méphitisme, lui a donné le nom de gaz méphitique. M. Sage, le regardant comme une modification de l’acide marin rendu volatil à cause de son altération par de la matière inflammable, le nomme acide marin volatil, & depuis il l’a nommé acide méphitique. M. Bergman, ne faisant attention qu’à sa propriété d’acide & à sa forme aérienne, l’appelle acide aérien. M. Bucquet lui donne le nom d’acide crayeux, de la substance qui le fournit en plus grande quantité, comme l’on dit acide vitriolique, acide nitreux, parce qu’on retire abondamment ces deux acides du vitriol & du nitre. Ainsi, gaz sylvestre, gaz méphitique, acide marin volatil, acide méphitique, acide aérien, acide crayeux, sont un seul & même principe dont nous allons parler sous le nom générique d’air fixe.


Section Première.

Des moyens d’obtenir l’Air fixe.

L’air fixe est tellement répandu dans toute la nature, qu’il paroît combiné, en général, avec tous les corps des trois règnes. Il en est le lien, l’ame, & souvent la vie ; c’est lui qui est, peut-être, le principe de toutes leurs modifications. Quelquefois sa présence est sensible, on le reconnoît par ses effets ; quelquefois aussi, invisible & sans action, l’art peut seul s’assurer de son existence : rarement, ou pour mieux dire, jamais on ne peut le développer & l’extraire de la matière à laquelle il est uni, sans altérer cette