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II. Du terrain de la pépinière, & des soins à donner aux amandiers. Toute terre forte, compacte, glaiseuse, ne vaut absolument rien pour la pépinière. Si les circonstances nécessitent à en former une dans une terre de cette qualité, il convient, & même il est nécessaire de la mélanger avec une moitié franche de sable : sans cette précaution, ce sera beaucoup travailler pour n’avoir que des arbres rabougris, mal enracinés, &c.

Le fumier doit être banni de la pépinière. L’arbre auroit trop à souffrir pour s’accoutumer ensuite au terrain léger & maigre qu’on lui destine. De fréquens labours suffisent. Le premier, lorsque la tige a pris assez de consistance ; le second à la fin de Mai, & le troisième à la fin du mois d’Août. Sarcler souvent est encore une obligation indispensable.

III. De la greffe. Celle employée communément est l’écusson ou œil dormant. On ne greffe en couronne que les arbres déjà formés, & rarement on y réussit, parce que la gomme qui découle de l’arbre dans la partie coupée, fait périr la greffe. Il vaut donc mieux décapiter l’arbre avant l’hiver, couvrir la plaie avec l’onguent de St. Fiacre, & attendre qu’il ait poussé de nouvelles branches sur lesquelles on greffera en écusson. Il est constant que dans le nombre des amandes, même choisies les unes après les autres pour planter, ou toutes amères, ou toutes douces, il se trouvera des variétés. Les unes donneront des sujets à fruits doux, les autres des sujets à fruits amers, ce qui nécessite absolument la greffe, afin d’obtenir l’espèce de fruit qu’on desire. Une observation essentielle à faire, est de ne greffer jamais sur un sujet trop maigre, sans quoi la greffe fera bourrelet, moins fort, à la vérité, d’amandier sur amandier, qu’amandier sur prunier. Lorsqu’on peut éviter cette défectuosité, pourquoi ne pas choisir un bon sujet ; & comment veut-on qu’une greffe réussisse & donne un beau jet, si l’arbre n’est pas vigoureux ?

L’amandier-pêcher, & l’abricot-pêche, prouvent combien il seroit facile à un amateur patient & adroit d’enrichir nos pépinières. Pourquoi, à l’exemple de la nature, ne feroit-il pas sur l’amandier l’opération décrite en parlant de la culture de l’abricotier ? (Voyez ce Chapitre, pag. 197) le mélange des étamines le dédommageroit de ses soins par des variétés nouvelles : ou bien, pourquoi n’essayeroit-il pas de mettre en pratique ce que le docteur Beal annonce dans les Transactions philosophiques, où il s’explique ainsi : « Si, après plusieurs greffes choisies & curieuses, on met l’amande dans un bon terreau, on peut s’attendre à quelques espèces nouvelles, comme demi-pêche, demi-abricot, &c. »

Voici encore une opération à tenter, qui demande beaucoup de dextérité. Elle consiste à lever sur une jeune branche, par exemple de prunier, d’abricotier ou de pêcher, &c. un écusson proportionné pour la grosseur, à celui qu’on aura enlevé d’un amandier ; partager exactement l’écusson de l’amandier & de l’abricotier, par exemple sur toute leur longueur ; rassembler la moitié de ces deux écussons, les