Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1781, tome 1.djvu/583

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celui du battage n’est pas moins critique. Si on veut battre une cuve comme il convient, il faut que l’indigotier soit, premiérement, convaincu du plus ou du moins qu’elle peut avoir. S’il est habile, il en sera instruit avant que le grain soit formé ; s’il y a de l’excès, il ménagera le battage ; s’il en manque, il doit pousser jusqu’à raffiner ; s’il a son point fixe, il doit bien se garder de l’outrer. Pour peu qu’il lui donne trop, il lui ôte son plus beau lustre. Si on ne veut pas excéder, il faut observer lorsque le grain est sur son gros & les degrés de sa diminution, jusqu’à ce que ce grain soit parfaitement rond ; qu’il roule l’un sur l’autre comme des grains de sable fin ; qu’il se dégage bien de son eau ; que cette eau paroisse claire & nette ; & que la preuve qui couvre le fond de la tasse d’argent, ou tasse d’essai, ou tasse d’épreuve, cherche à joindre l’eau quand on l’incline, de façon que le fond de la tasse reste nud & sans aucune crasse ; alors il est tems de cesser. Si le battage est continué, on tombe dans l’inconvénient de dissoudre les parties les plus subtiles, parce que les grains fournis par la tige n’ont pas la même consistance que ceux fournis par les feuilles. C’est ce qu’on remarque souvent après le battage d’une cuve trop poussée par une espèce de grain volage qui reste entre deux eaux, & qui, quoiqu’imperceptible, nuit extrêmement à l’écoulage de l’eau ; d’où il résulte que la dissolution des grains imparfaits, qui ont eu trop peu de battage, ne leur laisse pas le poids suffisant pour se précipiter au fond. De-là il s’ensuit que l’indigo a peine à égoutter ; ces grains fins s’attachent aux sacs dans lesquels on le met, & en bouchent les pores. Ce défaut dans la manipulation rend l’indigo molasse.

3o. Du bassinet, ou bassinot, ou diablotin. Quand le battage doit-il finir ? Il n’y a point d’époque fixe : on doit le suspendre dès que le grain est bien décidé. On reconnoît encore ce point critique, lorsque la couleur de l’extrait, si verte avant le battage, devient d’un bleu assez caractérisé. Dès-lors, on laisse le tout en repos, au moins pendant l’espace de deux heures. Dans cet intervalle, la partie jaunâtre, qui étoit un des principes de la couleur verte, & qui ternit encore la vivacité du bleu, se sépare de la fécule, la laisse précipiter au fond de la batterie, & surnage à la partie supérieure de l’extrait auquel elle donne une teinte dorée. C’est lorsque cette précipitation paroît bien accomplie, qu’on commence à décanter dans la troisième cuve ou bassinet. Au lieu de trois ouvertures ou robinets que porte la batterie, elle en a une seule à son extrémité pour laisser perdre l’eau. On commence par ouvrir le robinet supérieur de la batterie, & on laisse cette eau, après qu’elle est tombée du diablotin, se perdre & s’écouler dans la campagne. On en fait autant de l’eau qui s’échappe ensuite par le robinet placé un peu au-dessous. La fécule, après ces deux décantations, se trouve presque à sec : on étanche encore, autant qu’il est possible, le peu d’eau superflue qui peut y rester ; après quoi on lâche le dernier des trois robinets, & on y recueille pré-