Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1781, tome 1.djvu/660

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

appliqué contre un mur, mais planté dans une allée, c’est un éventail ; si au contraire les branches s’élancent circulairement autour de la tige, & si on a soin d’en dégarnir le dedans, de le tenir évidé, c’est un buisson. Ce mot cependant devroit être plus particulièrement adapté à l’arbre nain qu’on laisse pousser à sa volonté, sans le soumettre à la taille. On ne connoît point dans les environs de Paris ce genre d’arbres, parce qu’on aime la symétrie. Je l’ai déjà dit, le chinois a des fruits superbes, & il ne taille jamais ses arbres. Cette négligence est impardonnable aux yeux d’un jardinier européen ; & malgré cela, on court aujourd’hui après les jardins anglois, qui ne sont qu’une foible imitation de ceux dont les chinois leur ont donné l’idée. Quelle contradiction !

On dit encore arbre sur franc ; c’est celui qui a été greffe sur un sauvageon venu de pepin ou de bouture. Si, sur un pêcher déjà greffé, par exemple, on greffe un autre pêcher, c’est alors franc sur franc. Arbre greffé sur coignassier, est celui qui a été greffé sur une bouture de coignassier, ou sur un arbre venu d’un pepin du fruit du coignassier. On appelle arbre en mannequin celui qui a été semé ou planté dans un mannequin pour le lever en motte, & le mettre à la place qu’on lui destine. Le mannequin n’est ordinairement employé que pour les sujets délicats, & qui supportent difficilement la transplantation.

Ce n’est pas le cas de parler ici de la manière de planter les arbres, du terrain & de l’exposition qui leur conviennent, de leur taille, de leur gouvernement, de leurs maladies, &c. ce seroit une répétition inutile de ce qui sera dit en parlant de chaque arbre en particulier, ou de chaque opération qu’il exige.

Mais voici quelques principes qui ne sont pas à négliger ; consultez le sol & l’exposition de votre jardin ou de votre verger, avant d’y planter des arbres fruitiers ; &, d’après l’expérience, multipliez les espèces qui y réussissent le mieux. Ce n’est pas la variété des espèces de fruits qui fait la richesse d’un verger, mais leur beauté, leur saveur, leur nombre, & la facilité pour se conserver.

Plantez plus d’arbres à fruit d’automne que d’été, & plus d’hiver que d’automne.

Multipliez plus les pommiers & les poiriers, que les abricotiers & les pêchers ; la jouissance de ces derniers est de peu de durée. Une belle poire, une bonne pomme, font plus de plaisir au mois d’Avril, que l’abricot & la pêche en été. Ne perdez jamais de vue l’arrière saison.

Arrachez sans miséricorde tout arbre mal venu, souffrant, & sur-tout s’il donne du mauvais fruit : il occupe en pure perte la place d’un bon arbre. Si le sujet est sain & vigoureux, greffez-le de bon fruit ; mais ne perdez point de tems.

Tout arbre fourni par le pépiniériste, dont la greffe formera le bourlet, à quelque prix que ce soit, rejetez-le, laissez-le pour son compte ; à l’avenir il ne vous en fournira plus de semblables.

Il faut avoir la même fermeté pour tous les arbres dont les raci-