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nes seront garnies de loupes ; ce qui arrive souvent à celles de l’amandier.

Si les racines sont châtrées, mutilées ; si le pivot est coupé, laissez les arbres au pépiniériste ; mais ne plaignez pas l’argent, & payez largement les journées des ouvriers chargés du soin de tirer l’arbre de la pépinière ; vous retrouverez bientôt cette petite avance. (Voyez les mots Plantes, Pépinière.)

Préservez-vous de la folle manie de planter trop près, c’est manquer le but dès le principe ; & lorsqu’on est forcé d’y remédier en arrachant les arbres surnuméraires, le mal est déjà fait. Ceux qui restent seront long-tems à reprendre le dessus.


CHAPITRE V.

Des Arbres relativement aux limites.


Les propriétaires des héritages tenans & aboutissans aux grands chemins, sont tenus de les planter d’arbres analogues à la nature du terrain, à la distance de trente pieds l’un de l’autre, & à une toise au moins du bord extérieur des fossés des grands chemins, & de les armer d’épines. À leur défaut, les seigneurs qui ont droit de voirie sur ces chemins, pourront en faire planter à leurs frais, dont ils auront l’usufruit & la propriété. Cette loi n’est pas en vigueur dans toutes les provinces, & son observance contribueroit beaucoup à boiser le pays & à décorer les chemins. Il seroit très-avantageux de trouver des arbres pour suppléer l’ormeau si multiplié sur toutes les routes des provinces voisines de Paris. Les racines de cet arbre rampent sur la surface du terrain, s’étendent, suivant la grosseur de l’arbre, souvent à plus de trente toises de distance, & dévorent la substance des moissons. Le mûrier produit le même inconvénient, mais à un bien moindre degré. On l’éviteroit, si on plantoit ces arbres encore fort jeunes avec leur pivot. Lorsqu’ils en sont dépourvus, les racines sont forcées de s’étendre horizontalement, elles ne peuvent pivoter, & il ne se forme jamais de nouveaux pivots. La reprise de ces jeunes arbres seroit plus sûre, & on ne se plaindroit pas du dégât qu’ils occasionnent. Lorsqu’il s’élève une contestation sur la propriété d’un arbre, on l’adjuge à celui dans l’héritage duquel est le tronc ; mais quand le tronc est dans les limites, l’arbre est commun.

Quand un arbre étend ses branches sur le bâtiment voisin, le propriétaire de la maison peut demander qu’il soit coupé par le pied, mais si elles s’étendent seulement sur un lieu où il n’y ait point de bâtiment, le voisin peut demander que les branches soient coupées à quinze pieds de terre. Il est permis, dans l’usage, au voisin qui souffre que les branches d’un arbre soient pendantes sur son héritage, de cueillir les fruits de ces branches. Les arbres morts appartiennent à l’usufruitier ; ceux abattus par le vent, à celui qui a la propriété. Les arbres en futaies sont réservés au propriétaire ; l’usufruitier peut seulement en demander pour les réparations. Un fermier qui a planté des arbres, peut les emporter à la fin de son bail ; mais le propriétaire du fond est en droit de les retenir, en payant la valeur au fermier.