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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1782, tome 2.djvu/140

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tout votre pouvoir ; c’est une avance dont son travail vous paiera de gros intérêts par la suite ; c’est un homme précieux qu’il ne faut pas laisser échapper ; il s’attachera à vous par vos bienfaits, & il sera lié par la reconnoissance & par son propre intérêt.

Dans aucun cas, & sous aucun prétexte quelconque, ne prenez un chasseur, un pêcheur ou ivrogne. Cette classe d’êtres ne résiste jamais à la vue d’un fusil, d’un hameçon ou d’une bouteille. Jamais chasseur, pêcheur, buveur n’ont été riches. Le fermier ne doit quitter son habitation que le dimanche pour vaquer aux offices divins, doit aller rarement à la ville, & uniquement pour y vendre les denrées.

Avant de passer un bail à long terme, un propriétaire prudent aura sous les yeux le plan de ses possessions, &, ce qui vaudra encore mieux, en connoîtra chaque partie ; c’est le moment de fixer un plan réglé de culture, & sur-tout un plan d’amélioration. Il tracera sur le papier toutes les conditions qu’il exige du fermier, fera un tableau & un devis des améliorations à faire pendant chaque année du bail, de manière que le commencement des grandes entreprises soit fixé à la seconde année, afin que le fermier ait le tems de se récupérer de ses avances & de ses travaux : c’est le moment de commencer le défrichement des terres, la plantation des vignes, de former des pépinières dans tous les genres, &c. mais une clause essentielle qu’on ne doit jamais oublier, est de fixer le nombre d’arbres & les qualités qui, chaque année, seront plantés dans le domaine. Propriétaires, attachez-vous à boiser ; votre fonds doublera de valeur après la quarantième année. Si vos terres sont trop précieuses pour les sacrifier à des forêts, plantez leurs lisières en bois de construction, & multipliez les arbres fruitiers.

Avant de passer le bail, mettez sous les yeux du nouveau fermier le tableau des améliorations que vous exigez de lui afin qu’il le lise attentivement, le médite, & ne signe qu’après une pleine connoissance. C’est à vous à tenir la main par la suite à l’exécution de chacun des articles. Pour juger s’ils sont bien remplis, ne vous en rapportez qu’à vous-même, autrement vous serez trompé. Le fermier a beau être homme de bien, pour sa tranquilité il faut le croire, mais agissez toujours comme s’il ne l’étoit pas. L’homme surveillé en vaut mieux, & le champ y gagne.


BAILLI. C’est le nom d’un officier que les seigneurs hauts-justiciers préposent à l’administration de la justice, dans les terres de leur jurisdiction.

Bailli vient du latin bajulus[1] dont nos anciens annalistes se servent pour désigner le régent d’un royaume, le gouverneur d’un prince enfant. Bail, baillie, dans nos vieilles coutumes, signifient la tutelle, l’administration des biens

  1. Qui lui même dérive de bajulare : porter un fardeau.