Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1782, tome 2.djvu/153

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tre ans on émonde l’arbre de ses branches inférieures, ainsi qu’on le pratique sur les ormeaux qui bordent les grands chemins, la tige, emportée par la séve qui monte aux branches du sommet, s’élancera, gagnera en hauteur, acquerra peu de diamètre ; au lieu que celui de l’arbre n°. 2, gagnera en grosseur ce que celui-ci acquiert en longueur. 4o. Si plusieurs arbres sont voisins les uns des autres, & que les rayons du soleil pénètrent difficilement vers la racine, leurs tiges se dépouilleront de leurs branches inférieures ; & comme les tiges s’élancent toujours vers la lumière, dès-lors elles doivent monter & filer également les unes & les autres, si aucunes circonstances particulières ne s’y opposent. 5o. S’il se forme une clarière au milieu de ces tiges rapprochées, celles qui avoisineront cette clarière pousseront des branches latérales, & le brin principal cessera de s’élever, & ne s’occupera plus qu’à grossir. Tirons quelques conséquences de ces principes.

I. La méthode de conserver les baliveaux est-elle avantageuse ? L’ordonnance qui prescrit d’en laisser 16 par arpent a manqué son but, quoiqu’au premier coup-d’œil elle paroisse très-sage. Il y a très-loin de la spéculation à la pratique, & les loix de la nature ne se prêtent pas toujours aux loix dictées d’après nos idées.

1o. Ces 16 brins, sans doute les plus beaux parmi ceux qui ont poussé sur l’arpent pris pour exemple, ont une tête formée par des branches formant, avec la tige, des angles de 20 à 30 degrés. (Voyez fig. 25, pl. 18 du tome Ier, & lisez la page 630 & suivantes.) Ces angles ne pouvoient avoir plus d’étendue, parce que l’arbre est supposé jeune & vigoureux : dès-lors ses branches devoient toucher celles des arbres voisins. Dans cet état, son écorce est tendre, ses pores très-ouverts, ses vaisseaux remplis de séve, &c. il se trouve isolé avant l’hiver par la coupe du taillis. Voilà donc cet arbre, auparavant abrité par les tiges voisines, exposé à toutes les intempéries de la saison, & l’expérience a prouvé que presque tous les baliveaux ont péri en 1709 ; mais supposons qu’ils résistent aux rigueurs de l’hiver.

2o. Ces 16 brins, loin de continuer à élever progressivement leurs tiges comme dans les années précédentes, ne croîtront plus dans les mêmes proportions. Les branches latérales pousseront de tous les côtés, les supérieures s’inclineront & décriront successivement des angles de 40 à 50 degrés, &c. & les branches inférieures seront obligées de suivre la même direction, afin de jouir du bénéfice de l’air, de la lumière & des rayons du soleil ; enfin le tronc de l’arbre grossira, ses branches se prolongeront, & il ne croîtra presque plus. Sur ces 16 brins, à peine y en aura-t-il le quart qui prospérera, &, pour me servir d’une expression usitée par les forestiers, ils croîtront à la manière des pommiers.

3o. Ces baliveaux sont la ruine des taillis. Pendant les premières années, les baliveaux se hâtent à