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autrefois un grand nombre ; mais on y remédie présentement, en rendant ces veaux malades à leur mère,[1] qui les allaite & leur rend la vigueur. Ce remède est cher, parce qu’il prive le fermier du beurre que lui donneroit le lait de la mère. On prétend qu’en coupant le lait doux écrémé, d’une moitié d’eau, dans laquelle on auroit fait bouillir quelque tems des navets, des panais[2] & autres plantes douces & nourissantes, on préviendroit la langueur dont ces animaux sont attaqués, & qu’ils engraisseroient, parce que le suc de ces plantes suppléeroit, en quelque sorte, aux parties butireuses qui manquent au lait écrémé. Nous pensons que l’on pourroit essayer cette pratique sans aucun danger : mais il faut avertir les habitans de la campagne, qu’en général ils se servent indiscrétement des vases de cuivre pour chauffer les laitages qu’ils donnent à ces veaux ; le cuivre de leurs chaudières dépose dans ce lait, naturellement disposé à devenir aigre, parce qu’il est privé des parties grasses qu’il contenoit, une qualité corrosive, capable de nuire aux jeunes veaux, & même de leur donner la mort. Il est plus sûr de se servir de vases de terre, ou de marmitte de fer, dont il ne peut rien résulter de fâcheux. »

» À l’égard du lait écrémé que les veaux ne consomment point, on le fait cailler artificiellement le plutôt qu’il est possible, afin qu’il n’aigrisse pas ; on en fait alors des fromages communs, dont on se sert dans le ménage de la ferme, ou que les pauvres achètent ; enfin, le petit-lait qui sort de ces fromages, avec le lait écrémé qu’on n’emploie pas à cet usage, sert à la nourriture des cochons de la basse-cour. »


CHAPITRE III.

De la salaison des Beurres.

« Nos vues tendent à rendre le beurre propre aux salaisons, & à l’introduire par ce moyen dans le commerce, soit de l’intérieur du royaume, soit de celui qui se fait dans d’autres pays de l’Europe, soit enfin dans le commerce maritime, qui s’étend au-delà du tropique. »

» La méthode que nous venons d’indiquer, donne aux beurres les qualités nécessaires pour la conservation, mais il faut le saler de façon à le pouvoir conserver. Ces divers avantages dépendent de la qualité & de la quantité du sel qu’on y emploie, des vases dans lesquels on dépose le beurre salé, & de quelques autres circonstances. »

» Les fermiers n’étant pas dans l’usage de vendre leur beurre tout salé, le portent dans les marchés

  1. Ce remède ne réussit pas lorsque les vaches pâturent dans les marais ou il y a de la douve ; les mères meurent même lorsqu’on ne les livre pas au boucher trois ou quatre années après qu’elles ont commencé à pâturer dans ces dangereux fonds ; les moutons y périssent après la première année.
  2. L’usage de cultiver des panais & des navets pour donner aux vaches, est très-avantageux à ceux qui les gardent pendant l’hiver. Au surplus, voyez le mot Bétail.