Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1782, tome 2.djvu/391

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criptions méthodiques, les plantes dont ils parloient. On ne les auroit pas vu traiter deux fois le ray-grass & le fromental, faire deux espèces du sainfoin & de l’esparcette ; décrire un arbre pour un autre, &c. Que d’exemples on pourroit citer !

I. On distingue deux espèces de méthode ; l’une naturelle & l’autre artificielle.

Si la nature avoit divisé elle-même toutes les plantes en grandes familles, qui eussent les plus grands rapports non-seulement pour la forme, mais encore pour les qualités intérieures, alors nous aurions tout le règne végétal divisé en familles naturelles ; & par conséquent, la méthode qui les classeroit & qui en assigneroit les divisions, pourroit être regardée comme la méthode de la nature, une méthode vraiment naturelle. Mais nos connoissances en botanique ne sont pas portées au point nécessaire pour saisir tout cet ensemble. Nous ne connoissons qu’un certain nombre d’espèces ; & encore, celles que nous croyons connoître, les connoissons-nous parfaitement ? Toutes les parties qui les composent se sont-elles offertes à nous ? les avons-nous analysées ? sommes-nous assurés qu’elles possèdent telles ou telles propriétés ? une prétendue analogie, des rapports apparens, des simples similitudes ne nous ont-elles jamais égarés ? Quel est l’homme qui osera affirmer le contraire ? Nous sommes donc bien loin de composer une méthode naturelle ; il a fallu recourir à d’autres principes, pour suppléer aux bornes limitées de notre mémoire, saisir l’ensemble, se reconnoître au milieu de cette multitude d’êtres, & se faire un langage particulier, intelligible dans tous les tems & dans tous les lieux ; l’art & l’imagination sont venus au secours & ont tenu lieu des vérités que la nature nous cachoit ; on a construit des méthodes artificielles & des systêmes.

La méthode artificielle est fondée sur la connoissance de toutes les parties & toutes les propriétés des plantes.

Les besoins qui ont toujours été les premiers guides de l’homme, & auxquels il doit sa science & ses richesses, lui firent trouver dans les plantes, & des alimens & des remèdes : il n’y vit d’abord que ces deux objets principaux ; & l’importance des services qu’il en retiroit, régla ses premières divisions. Les plus anciens botanistes dont nous ayons les écrits, n’ont considéré que les usages auxquels on les employoit : Théophraste distingua les plantes en potagères, farineuses, succulentes, &c. & Dioscoride en aromatiques, alimenteuses, médicinales & vineuses. Si ces divisions sont insuffisantes, celles tirées des climats particuliers que les plantes affectionnent, & des saisons où elles fleurissent, sont encore bien plus vaines. Les qualités ou vertus médicinales des plantes, frappèrent les médecins ; ils voulurent rapprocher la botanique de son véritable objet, l’application à soulager l’humanité ; & ils distinguèrent les plantes par leurs qualités, amères, acerbes, salées, âcres, acides, austères, &c. & par leurs vertus, purgatives, apéritives, sudorifiques, emménagogues,