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qu’une plaie pénètre dans la cavité de la poitrine, par exemple par la fracture d’une côte, lorsque l’extrémité de la côte cassée touche le poumon ; ou enfin, lorsque pour guérir d’un écart, de la fourbure, du mal de cerf, &c. les ignorans font une incision à la peau, & introduisent dans l’ouverture un chalumeau ou un soufflet, & poussent de l’air, à peu près comme le boucher l’exécute avant d’écorcher un bœuf ou un mouton. Il n’est pas possible d’imaginer une pratique plus vicieuse.

Si la côte cassée porte sur le poumon, le plus court est de vendre l’animal au boucher, & si c’est un cheval, une mule, &c. de les tuer. On dépenseroit inutilement son argent à les faire traiter. Dans l’autre cas, il faut se hâter de donner issue à l’air soufflé, par des scarifications à la peau, & avec la main de pousser légèrement l’air vers ces issues, & aussitôt après de faire baigner l’animal dans l’eau la plus froide, & même d’appliquer de la glace sur les parties les plus tuméfiées.

Des causes intérieures. Elles sont toutes très-graves : la première marche à la suite d’une dyssenterie longue & opiniâtre. La bouffissure, ou tuméfaction se manifeste peu à peu sur le dos & sur les lombes ; & lorsque l’on comprime la partie affectée, l’animal éprouve de la douleur ; on entend & on sent un petit craquement sous les doigts. Cette tuméfaction est une preuve que la dyssenterie a épuisé les forces de l’animal, que sa substance tend à une décomposition générale, puisque l’air principe s’en dégage, ainsi que des fluides. Il est très-rare, dans cette circonstance, de rappeler l’animal à la santé. Dès qu’on s’apperçoit de cette maladie, il est indispensable de le séquestrer, de le séparer des autres animaux de son espèce, parce que cette dyssenterie est presque toujours épidémique. La prudence & l’intérêt du propriétaire exigent, que tout le fumier de l’écurie où étoit l’animal avant sa séparation des autres, soit enlevé avec soin, l’écurie bien balayée, les auges, les râteliers, les cordes, en un mot, tout ce qui lui a servi, lavé à plusieurs reprises, frotté, ratissé, & enfin pour la dernière fois, lavé avec du vinaigre très-fort. Quant à l’animal malade, il est indispensable de l’enterrer dans une fosse très-profonde, & de le recouvrir de plusieurs pieds de terre. Ceux qui alors vendent la bête malade aux bouchers, sont dans le cas, ainsi que l’acheteur, d’être punis sévérement par les Juges des lieux qui doivent veiller à la santé du citoyen ; toute grace en faveur des coupables est un crime encore plus grand contre la société. Sans une sévérité des plus rigoureuses, on risque de faire périr tous les bestiaux d’une province. (Voyez le mot Épizootie)

Le paysan souvent écrasé par la perte de son bétail cherche à profiter de la peau, écorche l’animal, & de la même main, va panser ceux qui restent dans l’écurie. L’expérience lui prouvera bientôt combien cette parcimonie lui sera fatale ; successivement tout son bétail périra pour la valeur d’une peau. Quelle économie ! Ce n’est pas tout, cette même peau peut encore donner lieu à l’épizootie par-tout où elle sera transportée : c’est par attouchement & non par l’air que le mal se propage,