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trémités des branches s’altèrent & se dégarnissent ; les fleurs & les fruits deviennent rares & aqueux, ils mûrissent difficilement ; enfin l’arbre meurt avant d’avoir fourni sa carrière ordinaire.

Ce que nous avons dit plus haut suffit pour expliquer la formation de ces bourrelets, & ce dérangement de la nature. Les tiges, les feuilles que poussent la greffe, fournissent la séve descendante, qui doit aller nourrir les racines ; mais rencontrant un défaut de continuité, un vide à l’endroit même de la greffe, elle s’arrête & produit bientôt un bourrelet. Comme la tige de la greffe est tendre & délicate, les fibres s’étendent & se dilatent facilement ; aussi, le bourrelet croît-il promptement les premières années. L’arbre se fortifiant, toutes les parties deviennent plus dures & plus compactes. Mais l’affluence de la séve continuant toujours, il faut qu’à la fin l’épiderme & l’écorce éclatent & se fendillent. Ces ouvertures sont autant d’orifices que la séve s’approprie, & par laquelle elle s’extravase. L’humidité perpétuelle dont ces parties ligneuses sont continuellement abreuvées, les variations & les intempéries de l’air, font fermenter la séve déposée dans ces canaux, ces gouttières, elle s’y corrompt, & par son âcreté, elle attaque & corrode tout ce qu’elle touche. M. l’abbé Schabol attribue la formation de ces bourrelets à quatre autres causes, qui effectivement y concourent. 1o. Une greffe qui dans une pépinière, a été appliquée sur un sauvageon trop fluet ou vicieux ; la séve, suivant lui, se portant plus facilement dans la greffe où elle trouve plus de jeu & de tendance à se prêter à toute sorte d’extension, que dans une mauvaise tige où elle n’éprouve que de la roideur & un serrement universel dans toutes ses parties. 2o. Les branches perpendiculaires à la tige ; car on remarque en général que les arbres qui en ont beaucoup, ont le bourrelet de la greffe du double au moins plus gros que le tronc. 3o. Le retranchement des gourmands, qui sont les entrepôts & les magasins de la séve : lorsqu’elle en est privée, elle se porte vers la greffe & elle se décharge horizontalement à l’endroit de la suture qui s’est faite entre elle & le sauvageon. 4o. Enfin, le pincement & la suppression des extrémités des bourgeons durant la pousse, qui troublent le cours de la séve, l’arrêtent & l’obligent de refluer vers la greffe.

On peut empêcher que ces bourrelets ne deviennent préjudiciables aux arbres, mais il n’est pas possible de les faire disparoître. Voici les moyens que M. Schabol indique pour arrêter leur accroissement : il consiste à scarifier au printems l’écorce de la tige, depuis le tronc jusqu’à ce bourrelet, d’abord par derrière l’arbre ; l’année suivante, on réitère cette opération sur un des côtés, à la troisième sur l’autre, & à la quatrième par devant. Cette incision n’est utile qu’à l’égard des arbres dont l’écorce est lisse, unie & dénuée de nœuds. Au reste, on ne la répète qu’à proportion des progrès de la tige. Il est certain que si la séve descendante vient ainsi à rencontrer des issues, elle ne formera plus le dépôt qui