Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1782, tome 2.djvu/469

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couper au-dessous, & mettre en terre la partie où se trouve le bourrelet. Comme il n’est pas facile de trouver toujours de semblables branches, il est à propos de laisser un peu du vieux bois au plantard ou plançon. On aiguise la partie qui doit être enterrée, mais on a soin de ménager la petite partie du vieux bois adhérente au plançon ; c’est un bourrelet tout formé. Si on n’a pas conservé du vieux bois, il faut avoir soin de conserver & de ne pas endommager l’écorce, au moins sur un des côtés du plançon. On peut, par exemple, laisser huit à dix pieds au plançon de saule, & le couper au-dessus. Il n’en est pas ainsi du peuplier, il exige que la baguette soit conservée en entier, ainsi que le bouton qui la termine. C’est par ce moyen que le peuplier noir ou du pays, que celui d’Italie, &c. poussent des tiges élevées. Mais lorsqu’on veut avoir un peuplier commun seulement, pour convertir ses feuilles en échalas, ou lorsqu’on destine ses rameaux à la nourriture des moutons, on coupe la tête du plançon à la même hauteur que celle du saule. Dans ce cas, on se soucie peu de la tige, mais de la multiplicité des branches. Il faut convenir cependant que la reprise de ces boutures est moins assurée que si on avoit laissé la tige entière.

Je ne suis point de l’avis de ceux qui conseillent de faire des entailles dans la partie de la branche qui doit être enterrée. On veut, par ce moyen, multiplier la naissance des bourrelets ; mais on ne fait pas assez attention que ces entailles, que ces coches amusent la séve, dérangent ses conduits, qu’elle est obligée de tourner & retourner par d’autres canaux, pour venir reprendre sa direction.

Second genre de boutures des arbres moins communs ; par exemple, des grenadiers, de l’épine blanche ou aubépine, du groseillier, &c. Coupez une branche saine, vigoureuse, garnie de ses rameaux ; ouvrez un petit fossé, & placez les branches dans ce petit fossé, de manière que la terre les recouvre entièrement ; mais ayez soin d’étendre les rameaux comme si vous aviez à disposer des racines. La pratique de cette opération est fondée sur ce que ces rameaux ont beaucoup de boutons, soit à bois, soit à fruit, soit intercutanés. Les premiers & les seconds seront nuls, c’est-à-dire, qu’ils pourriront ; mais le bourrelet qui soutenoit la feuille & le bouton, produira des racines. Ces rameaux offrent donc un grand nombre de petits bourrelets, & ce nombre est au moins décuple de celui d’une bouture simple. Ce n’est pas tout, les boutons intercutanés ont bien plus de facilité à percer l’écorce tendre des rameaux, que celle de la branche qui sert de bouture : ainsi, soit en raison de la multiplicité des bourrelets, soit en raison des boutons intercutanés, il est constant que cette manière de faire les boutures peut s’appliquer à un bien plus grand nombre d’arbres & d’arbrisseaux qu’on ne pense. Ici la branche change de direction ; ce qui formoit son sommet devient sa base, & sa base son sommet. La réussite, malgré ce changement de situation, ne doit pas surprendre,