Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1782, tome 2.djvu/48

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de parler, pourront sans risque s’attacher à celle que je vais décrire, & dont je me trouve bien : mon terrain n’est ni bon, ni mauvais, ni trop sec, ni trop humide, ni trop léger, ni trop compacte.

J’ai fait creuser les fosses à deux pieds de profondeur, sur quatre pieds de largeur, à la fin d’Octobre, & jeter la terre sur un ados de quatre pieds de base. Depuis plusieurs mois on ramassoit avec soin les balayures des basses-cours, des cuisines, des bûchers ; les débris de bois, de végétaux, avec un peu de fumier de cheval : tout cela fut successivement jeté dans ces fosses jusqu’au commencement de Février. À chaque reprise, on couvroit d’un demi-pouce avec la terre des ados. À la fin de Février, le tout fut consommé, à l’exception de quelques brins de bois, & on combla de cinq à six pouces le fond des fosses. Lorsqu’on les ouvrit, leur couche de terre supérieure fut portée dans l’allée du jardin la plus voisine, & mêlée avec un tiers de sable un peu gras, & un tiers de fumier de cheval, qui fermentoit en monceau depuis deux mois. Il étoit assez pourri, & pas encore réduit en véritable terreau. Cette terre ainsi préparée, resta en monceau & recouverte de longue paille, jusqu’à la fin de Février.

À cette époque le fond des fosses fut travaillé à plein fer de bêche, c’est-à-dire, sur onze à douze pouces de profondeur, & le terreau bien mêlé avec la terre. Dans le même tems on passoit à la claie la terre préparée du monceau de l’allée, & avec ce mélange la fosse fut exhaussée de huit pouces. Le terrain bien nivelé, bien râtelé, les pattes d’asperge furent placées sur toute l’étendue des fosses, à quinze pouces de distance en tout sens, & la personne chargée de les enterrer les couvroit successivement avec la même terre, à trois pouces au-dessus de l’œil de la patte. Dans la première fosse, les racines des pattes furent placées horizontalement ; dans la seconde, on eut soin de les enfoncer sur une direction plus oblique que perpendiculaire, & ainsi de suite pour les autres fosses, & je n’ai pas encore vu qu’il résultât une différence sensible dans les plantes d’une fosse ou d’une autre.

Chaque année, depuis la fin d’Octobre, c’est-à-dire, aussitôt que les tiges sont parfaitement desséchées, jusqu’au commencement de Février, on porta sur ces fosses les balayures des appartemens & des cuisines seulement ; & au commencement de Mars, on ajouta quelques pouces de terre des ados : un très-léger labour avec la pioche ou avec la bêche, mélangea le tout. Enfin la fosse parfaitement comblée, il y eut du terrain de trop, & il fut transporté sur les carreaux voisins. Les asperges qu’on coupe chaque année sont très-belles & très-bonnes.

Plusieurs auteurs recommandent de remplir le fond des fosses avec des cornes, des ongles, des os de bœuf & de mouton, avec les retailles des cordonniers, des tailleurs, &c. Ces substances animales ne produiront pas un grand effet dans les premières années : lorsqu’elles se putréfieront, à la longue, elles commenceront à devenir