Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1782, tome 2.djvu/533

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

que l’indigence est assise à leur porte, & par conséquent ils sentent plus vivement les besoins de leurs semblables, tandis que vous ne soupçonnez pas s’il existe des malheureux ! Actuellement que je vous apprends qu’il en existe, rentrez en vous-mêmes, & demandez-vous : En quoi ai-je mérité de jouir d’un sort plus doux ? Vous consommez plus dans un jour, & souvent dans une heure, que cette famille entière dans une année. Si vous êtes hommes, rougissez de son état. Presque toujours c’est vous qui la réduisez à la misère, en pressurant vos vassaux, en vexant vos fermiers, en attirant à vous & dans la ville tout le produit de la terre. Ces malheureux ont travaillé & moissonné pour vous, & à peine leur laissez-vous de quoi glaner ! On auroit tort de penser que ce tableau est chargé ; je le peins d’après nature, & je dirois à celui qui le jugeroit ainsi : Venez & voyez ; parcourez ces antres, ces espèces de sépulcres où la misère s’est réfugiée ; voyez les malheureux qui les habitent : ils sont plus à plaindre que les animaux confiés à leur soin ; l’animal pâture dans les champs, & son conducteur est sans pain.

Cabane de berger. Il y en a de deux sortes ; l’une portative, & l’autre fixe.

La première est une espèce de très-petite chambre, faite avec des planches, portée sur un charriot à quatre roues, & plus communément à deux, dans laquelle le berger couche à côté du parc où le troupeau est renfermé. Cette demeure mobile change de place, & suit le parc. On la maintient parallèlement, au moyen de deux piquets, l’un placé sur le devant & l’autre sur le derrière : ils tiennent au charriot à l’aide d’une cheville & d’une boucle de fer. Celui de devant sert à tirer & faire rouler la cabane, & l’autre la suit.

La cabane fixe est également en planches, & le plus souvent en pierres. On peut la considérer plutôt comme un abri pour garantir les bergers des pluies & des vents froids. Elles sont assez communes sur les montagnes où les troupeaux sont stationnaires pendant la belle saison.

Cabane de vers à soie. Logement dans lequel ils fixent leur cocon. Elles sont faites avec de la bruyère, ou de la fougère, ou avec le gramen, enfin avec toute espèce de plante rameuse dont on peut plier les petites branches en forme de voûte. (Voyez le mot Ver à soie)


CABARET. Taverne ou maison où l’on donne à boire & à manger aux particuliers pour de l’argent. Les cabarets sont la ruine des campagnes. Le paysan ne revient jamais chez lui les jours de fêtes sans être pris de vin, & il dépense plus dans un jour qu’il ne gagne pendant toute la semaine. Ce n’est pas encore le plus grand mal. Les misérables domestiques trop désœuvrés ont commencé par y jouer aux cartes ; le paysan a été associé à leurs jeux, & la fureur a gagné de proche en proche. Il ne manquoit plus que ce fléau pour abymer nos campagnes. Si les gens préposés par le seigneur du lieu n’emploient pas la sévérité la plus grande, & contre les joueurs & contre