Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1782, tome 2.djvu/701

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

tagnes. Ces grandes chaleurs, à la vérité, ne sont pas de longue durée ; mais elles sont assez considérables pour être en état de faire mûrir des fruits & des légumes qui ne croissent que dans nos provinces méridionales.


Section III.

De la chaleur artificielle.


Jusqu’à présent nous n’avons considéré que la chaleur atmosphérique & terrestre, celle qui existe dans la nature, qui lui est propre, soit qu’elle vienne du soleil, soit qu’elle soit inhérente au globe ; en un mot, celle que nous avons d’abord désignée sous le nom de naturelle. La chaleur artificielle n’est pas moins digne de toute notre attention, puisque nous allons lui voir jouer un très-grand rôle dans l’économie animale & végétale. Produite par l’art ou du moins mécaniquement, elle doit sa naissance au frottement ou à la pénétration. Deux corps que l’on frotte l’un contre l’autre, s’échauffent d’abord, & si l’on continue long-tems & avec rapidité la même opération, ils parviennent enfin à s’embraser. C’étoit le moyen que la nature avoit enseigné aux sauvages pour avoir du feu, & deux morceaux de bois très-durs étoient entre leurs mains le principe de la chaleur & du feu.

Deux liqueurs qui se pénètrent, des principes fermentescibles qui agissent & réagissent les uns contre les autres, peuvent produire de la chaleur. Dans toute fermentation vineuse la chaleur suit des degrés constans. De façon que par eux on peut connoître facilement les progrès de la fermentation, quand elle s’établit, quand elle est à son dernier période & qu’elle va passer à la fermentation acéteuse ; ce qui est si important dans la fabrication des vins. (Voyez le mot Fermentation) Ces deux causes de la chaleur se retrouvent sans doute dans la chaleur animale.


Section IV.

De la chaleur animale.


Dans l’homme comme dans les animaux, il existe un principe de chaleur sans cesse agissant. Il répare continuellement les pertes que le contact immédiat du milieu environnant occasionne, & cette réparation est toujours proportionnée à la gradation, à la marche de la cause qui nécessite ces pertes. De plus, ce principe doit être absolument autre chose que la chaleur que le corps animal reçoit lui-même du milieu dans lequel il existe ; cette seconde chaleur est nécessairement en raison de la température ambiante, & varie comme elle. Un cadavre n’a plus que cette dernière, froid ou chaud, comme l’atmosphère ou le corps sur lequel il repose, rien en lui ne peut compenser cette alternative. Au contraire, l’homme & l’animal vivans jouissent jusqu’à un certain terme d’un degré de chaleur uniforme, indépendant des variations & des changemens arrivés autour d’eux. Tantôt l’homme exposé à environ soixante-dix degrés de froid (thermomètre de Réaumur), comme dans l’hiver de 1735 le 16 Janvier à Yeniseik en Sibérie, & même à plus de soixante-onze & demi, comme à Tornea le 5 Janvier 1760 ; l’homme, dis-je, conserve environ vingt-huit à vingt-neuf degrés & demi de chaleur naturelle ;