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tantôt s’exposant, comme MM. Fordyce, Banks, Solander, à un degré de chaleur immodérée, il parvient petit à petit à rester quelques minutes dans une étuve échauffée jusqu’au-soixante-dix-neuvième degré & demi de chaleur, c’est-à-dire, presqu’au terme de l’eau bouillante, sans cependant que sa chaleur naturelle varie beaucoup, puisqu’elle s’est toujours soutenue à trente ou trente-deux degrés.


§. I. Comment on doit estimer la chaleur animale.

Il est donc un point, un terme fixe, autour duquel se font les variations assez légères. Pour connoître le vrai degré, il faudra donc soustraire la chaleur propre ou naturelle de la chaleur absolue. Que la chaleur atmosphérique soit de dix degrés, par exemple, & que la chaleur absolue de l’animal soit de vingt-huit, il faudra retrancher les dix degrés atmosphériques, il ne restera de chaleur naturelle que dix-huit. L’augmentation de cette chaleur naturelle est proportionnelle à celle du froid. La chaleur absolue étant supposée vingt-huit, & celle du milieu ambiant de dix, si cette dernière descend à cinq, la chaleur naturelle augmentera de cinq, & sera de vingt-trois à zéro ou au terme de congélation ; l’animal fournira, pour ainsi dire, à lui seul la somme de vingt-huit. Si le froid augmente de plusieurs degrés, alors l’animal produira autant de degré de surplus qui se perdront nécessairement pour établir l’équilibre de chaleur entre le corps de l’animal & le milieu dans lequel il se trouve. C’est pour cela que dès qu’on passe dans un appartement froid, la sensation du froid, vive dans le premier instant, diminue par degré ; l’atmosphère de l’appartement s’échauffe nécessairement ; & si un certain nombre de personnes se trouvent rassemblées dans un même lieu, cet endroit acquerra un degré de chaleur très-considérable. On sent facilement que cette production de chaleur superflue ne peut se faire que jusqu’à un certain point. Cet accroissement reconnoît des bornes : quand l’animal ne peut parvenir à établir un parfait équilibre entre la chaleur vitale & la température environnante, l’engourdissement s’empare d’abord des extrémités, gagne bientôt les parties nobles, & le cœur qui semble être le foyer générateur de la chaleur animale, & termine enfin sa vie par la destruction totale du mouvement & des organes qui le produisent & le conservent.

Pour bien entendre tout ce que nous avons encore à dire sur la chaleur animale, il faut savoir qu’en général on distingue les animaux en deux classes, en chauds & en froids. Les animaux froids (s’il en existe réellement) sont ceux qui n’ont qu’un degré de chaleur un peu supérieur à celui du milieu qui les environne, & qui participent exactement à tous les changemens qui arrivent dans la température ; les grenouilles, les vers, les poissons, les insectes, en un mot, tous ceux dont la chaleur, étant fort au-dessous de la nôtre, affectent notre toucher de la sensation du froid. Les animaux chauds, au contraire, sont ceux qui comme l’homme, jouissent d’un degré de chaleur naturelle très-supérieur à celui du milieu dans lequel ils vivent.