pour prévenir tout événement, je préfère l’intermède du sable très-sec, peu sujet à attirer l’humidité de l’atmosphère & qui laisse à l’humidité des fruits les moyens de s’échapper avec facilité. Règle générale, il faut tenir les châtaignes & les marrons dans des lieux très-secs, très-exposés à un courant d’air non humide ou trop froid ; la gelée fait périr le marron.
Il existe encore une autre méthode publiée par M. Parmentier, dans son excellent Traité de la Châtaigne, imprimé en 1780. Voici comment il s’explique : « Les châtaignes & les marrons, ramassés au grand soleil, exposés ensuite à l’action de cet astre pendant sept ou huit jours sur des claies que l’on retire tous les soirs, & que l’on pose les unes sur les autres dans l’endroit de la maison le plus chaud, acquièrent la propriété de se conserver très-long-temps, & même de supporter les plus longs trajets sans rien perdre de leur saveur agréable & de leur faculté réproductive ; mais cette méthode dont la bonté est connue, ne peut être pratiquée par nos marchands, parce que les fruits ainsi séchés au soleil, ont perdu un peu de leur volume, & leur surface extérieure, au lieu d’être lisse, est ridée ; ce qui seroit un obstacle au débit de la denrée qui a besoin, comme beaucoup d’autres, du coup-d’œil. »
M. Parmentier propose encore une recette pour manger la châtaigne verte pendant toute l’année. « Elle consiste à faire bouillir ce fruit pendant quinze à vingt minutes dans l’eau, & l’exposer ensuite à la chaleur d’un four ordinaire, une heure après que le pain en a été tiré. Par cette double opération, la châtaigne acquiert un degré de cuisson & de dessiccation propre à la conserver très-long-temps, pourvu qu’on la tienne dans un lieu extrêmement sec. On peut s’en servir ensuite en la mettant réchauffer au bain-marie ou de vapeur. Ceux qui préfèrent de la manger froide, n’ont besoin que de la laisser renfler à l’humidité pendant l’espace d’un ou deux jours. »
Après la première dessiccation, si on désire faire des envois de châtaignes ou de marrons, il faut séparer tous les fruits meurtris : dès que la peau brune qui les recouvre est entamée, le fruit pourrit. S’ils souffrent des cahos, des chocs violens dans la route, ils se conservent peu, & beaucoup moins s’ils sont humectés par la pluie & que le trajet soit long. Comme ils sont amoncelés & serrés les uns contre les autres dans le ballot, cette eau réagit sur la châtaigne, excite une nouvelle fermentation, & le fruit se renfle. On ne doit donc plus être surpris, lorsqu’on déballe les marrons, de les voir quelques jours après se rider, l’écorce brune se séparer, pour ainsi dire, du fruit, & le fruit balotter en dedans. Soyez assuré qu’avant l’espace d’un mois, plus de la moitié sera pourrie. Le dégât sera plus considérable encore, si le marchand, de mauvaise foi, & qui vend d’après la mesure, a expédié des marrons encore trop humides. L’acquéreur fera des plaintes, & il lui répondra : cette année est mauvaise, les marrons ne se conservent pas ; mais il n’ajoutera pas que c’est presque toujours à cause de sa négligence ou de sa friponnerie.