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Le tuyau d’une cheminée est un canal dans lequel doit s’écouler la fumée d’un corps qui brûle. Deux causes principales déterminent la fumée à s’élever dans ce canal : 1o. sa légèreté plus grande que celle de l’air de l’atmosphère ; 2o. le mouvement que lui a imprimé le feu, & qui est perpétuellement augmenté par la raréfaction de la colonne d’air renfermée dans la cheminée, & dilatée par le feu qui est à sa base. Tant que la fumée sera plus légère qu’un pareil volume d’air, elle s’élèvera d’elle-même & sans effort ; tant que la colonne d’air sera dilatée, elle cherchera à monter, & entraînera avec elle la fumée ; enfin, tant qu’une nouvelle colonne d’air remplacera, par l’ouverture inférieure de la cheminée, celle qui s’échappe par l’orifice supérieur, la fumée ne pourra redescendre & rentrer dans l’appartement. Qui ne seroit pas persuadé qu’après des principes si simples & si clairs, on ne pût être sûr d’empêcher toute cheminée de fumer ? Cependant, rien de si difficile. Il y a tant de causes, tant de circonstances intérieures & extérieures, prochaines & éloignées qui font fumer, qu’il est presque impossible de les détruire toutes à la fois. Nous allons en parcourir quelques-unes, afin que les connoissant, on puisse y remédier jusqu’à un certain point.

1o. Un des grands défauts d’une cheminée, c’est le parallélisme de ses parois ; les quatre côtés ou les quatre murs s’élevant toujours également, gardent entr’eux une même distance, ou s’ils se rapprochent, c’est de si peu, qu’on doit compter ce rapprochement pour rien. Cette construction vicieuse retarde l’ascension de la fumée, & accélère sa chûte, parce que, dans les angles, il se forme naturellement un remoux par lequel une partie de la fumée redescend vers le foyer, le long des parois, tandis que l’autre remonte par le centre. Le remède à ce défaut est de construire, 1o. le tuyau circulaire, & non pas carré ; 2o. de rétrécir l’âtre de la cheminée, par deux corps de maçonnerie, jusqu’à quelques pouces au-dessus du chambranle. Alors la fumée, en redescendant dans les angles, rencontre ces deux corps, se trouve arrêtée dans sa route, reflue sur elle-même, & se mêlant avec le courant de fumée du milieu, elle s’élève avec lui. Si le tuyau circulaire va en rétrécissant vers le haut de la cheminée, alors cette colonne de fumée, diminuant toujours de grosseur, se resserre avec le tuyau, acquiert de la force, gagne de la vélocité en perdant de l’espace, comme une rivière dont le lit va en rétrécissant ; & son effort étant égal en tout sens, elle s’élève tout à la fois.

2o. La disproportion de l’orifice supérieur de la cheminée, avec son ouverture inférieure. S’il est beaucoup trop petit, relativement à l’intérieur & au feu qu’on veut y faire habituellement, la fumée n’a plus assez d’espace pour s’exhaler, & le tourbillon, qui reflue alors dans l’appartement, ne redescend pas, mais n’a pu monter. Au contraire, si l’ouverture supérieure se trouve trop large, comme il arrive aux cheminées de cabinet, qui se dévoient dans de grands tuyaux ; dans ce cas, la petite colonne d’air, parvenue à l’espace plus large, s’étend, se divise, prend une surface plus grande