Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 3.djvu/273

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

faut lui fournir un aliment sain & abondant, tel que le bon foin, un peu de luzerne, du sainfoin, de l’eau blanchie avec la farine d’orge & de froment. Cette nourriture convient même à la jument qui allaite : on ne doit point encore la faire travailler, comme on le pratique malheureusement à la campagne, parce que le travail, quelque petit qu’il soit, échauffe le lait, & diminue sa sécrétion. Il est donc essentiel de la laisser tranquille avec son poulain : celui-ci, en s’égayant, en courant & en bondissant dans le parc, se fortifie ; son accroissement en est plus prompt & plus parfait. Il s’habitue peu à peu aux alimens solides ; il tette moins fréquemment, & parvient insensiblement au point d’être sevré sans inconvénient.


Section VIII.

Du temps du Sevrage, & des moyens de l’opérer.


C’est à six mois qu’on sèvre le poulain. Un plus long usage de lait le rend mol & flasque : d’un autre côté, la jument, fatiguée d’avoir nourri pendant tout ce temps, dépérit considérablement, si le poulain continue à la têter. Il est quelquefois des accidens qui obligent de le sevrer au bout de trois mois ; mais il est toujours plus avantageux de ne le faire qu’à six, les poulains en étant plus forts, plus en état de supporter la rigueur de l’hiver, & le changement de nourriture, du vert au sec.

Dans les premiers jours du sevrage, on doit diminuer la nourriture de la mère, pour lui faire passer son lait ; la traiter, quant au régime, avec l’eau blanche, une diète plus ou moins sévère, selon la quantité de lait, en observant sur-tout de la tenir bien chaudement : mais, quant aux poulains, il est à propos de placer dans les parcs des baquets remplis de la farine d’orge ou de petit lait. Rien ne contribue plus à les entretenir en bon état, & à leur faire prendre du corps ; mais il faut avoir soin de renouveler deux fois le jour cette boisson, sans quoi elle s’aigrit, & contracte des qualités mal-faisantes. On ne doit toucher les poulains que le moins qu’il est possible, depuis le moment de leur naissance jusqu’à l’âge de deux ans, parce que leur délicatesse en souffre. Il est bon aussi de les rendre familiers, sans les tourmenter. Dans la belle saison, c’est-à-dire, depuis le mois de mai jusqu’en septembre ou octobre, suivant les climats, on abandonne les poulains dans les parcs qui leur sont destinés, pourvu qu’ils soient garnis d’herbages, ou bien dans de gras, pâturages, en les y laissant nuit & jour jusqu’à l’hiver, temps où ils doivent être retirés dans les écuries. Il doit y avoir, sous les hangars des parcs, des auges où l’on puisse mettre tous les jours quelques jointées d’orge concassé, ou quelque peu d’avoine cartellée. Les poulains retirés dans les écuries, on doit les nourrir avec le bon foin, l’orge cartellée & l’eau blanche ; les laisser en liberté sans les attacher, placer les auges & les râteliers à une certaine hauteur. Si les râteliers sont trop hauts, les poulains en contractent l’habitude de porter la tête relevée. Le fumier leur gâte les pieds ; il convient donc de les tenir