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la végétation. Lorsque le fruit approche de sa maturité, les arrosemens ou les pluies abondantes le font gercer, fendre, & on ne peut plus le conserver pour l’hiver.

Dans les provinces du nord, il convient de faire porter les fruits sur des carreaux, sur des tuiles, & de couper les feuilles qui les ombragent, afin d’accélérer leur maturité. Dans celles du midi, ces précautions sont superflues, le soleil dessèche les feuilles, le fruit reste exposé à son ardeur, & il y mûrit complètement.

Lorsque le fruit est bien mûr, ce que l’on reconnoît à l’écorce, quand l’ongle peut difficilement y faire des impressions, séparez-le de sa tige, portez-le dans un lieu sec & à couvert, exposé au gros soleil, afin de faire évaporer son humidité superflue. Placez ensuite ces fruits dans un lieu sec, aéré, à l’abri des gelées, & vous les conserverez non-seulement pendant l’hiver, mais jusqu’à ce que les autres soient prêts à être mangés dans l’année suivante. Je parle des citrouilles, car les courges longues, les bonnets d’électeurs, &c. ne sont bons que lorsqu’ils sont jeunes.

La meilleure manière de conserver les graines est de les laisser dans le fruit, quand même il pourriroit. La pourriture qui attaque la pulpe charnue, n’endommage pas la graine. Si la partie pourrie se dessèche, comme cela arrive ordinairement, la graine y reste à l’abri des impressions de l’air. Les rats, souris, &c. sont singulièrement friands de ces graines, ils percent l’écorce & la pulpe pour les manger.


CHAPITRE IV.

Des propriétés économiques des Citrouilles, Courges & Pastèques.


I. Relativement aux hommes. Les plantes cucurbitacées n’ont pas une saveur aussi décidée, dans les provinces du nord, que dans celles du midi ; malgré cela elles conservent toujours une chair un peu aromatique, fondante, & qui fournit un aliment de facile digestion. Le bonnet d’électeur & la courge sont à préférer à tous les fruits dont nous venons de parler. Ces fruits offrent une ressource précieuse pour nourrir les gens de la métairie : on en fait des loupes, & on les prépare en ragoût, soit avec du lait, soit en aiguisant un peu avec le verjus, ou avec le vinaigre. Quelques auteurs disent qu’on en fait du pain, & c’est d’après eux que je vais en décrire la manipulation, car je ne l’ai jamais vu mettre en pratique.

« Si vous avez une grande quantité de citrouilles, ou plus qu’il n’en est besoin pour nourrir votre famille, vous en mettrez dans le pain de vos domestiques, & dans le vôtre. Pour cela, vous ferez bouillir la citrouille, de la même façon que celle qu’on veut fricasser ; il faut pourtant qu’elle soit un peu plus cuite ; puis vous la passerez à travers un gros linge, pour en retirer de petites fibres qui s’y rencontrent. Après quoi vous détremperez votre farine avec une citrouille parlée, en ajoutant, s’il est nécessaire, de l’eau dans laquelle elle aura été cuite, & vous en ferez du pain de la même manière que l’on fait le pain ordinaire. Ce pain est jaunâtre & de bon goût, un peu gras quand