Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 3.djvu/415

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cloque, en différens cantons, durant nombre d’années, pour observer & suivre cette maladie dans tous les terreins & à toutes les positions ; comme aussi pour recueillir les sentimens des plus experts dans l’art du jardinage. Tous s’accordent à dire que la cloque est une maladie pestilentielle du pêcher, l’une des plus bizarres & des plus variables de celles qui concourent à sa perte ; & ils l’attribuent à un mauvais vent. Mais ce vent pernicieux, auteur de ces désordres, souffle tous les ans, & est accompagné de gelées meurtrières ; & néanmoins ce n’est pas toujours alors que cette maladie a lieu. Quelques feuilles sont rôties, quelques bourgeons desséchés, certaines branches viciées meurent, nombre de fleurs avortent, des fruits noués sont grillés, sans que tout l’arbre soit maltraité ».

« Il est démontré que dans un tel événement, il y a un dérangement de nature, occasionné par une cause accidentelle, qui n’a pas encore été découverte. Cet accroissement subit, tant dans les feuilles que dans les bourgeons, qui, immédiatement après cette métamorphose, pèsent deux ou trois fois plus que les feuilles épargnées, n’est pas le seul effet du vent. De plus, ayant mis dans le microscope, & disséqué ces bourgeons & ces feuilles cloquées, je les ai trouvées différemment conformées que les feuilles saines du même arbre. Le flux de gomme qui paroît incessamment dans le vieux bois, n’annonce-t-il pas un épanchement de sève, mal préparée, mal cuite, mal digérée ? Il faut nécessairement supposer qu’il s’est fait dans la tige d’abord, ensuite dans le réservoir de la greffe, puis dans les grosses branches, & enfin dans les bourgeons, une sorte de cacochymie qui a causé ce bouleversement universel, & que la sève a passé tout-à-coup dans toutes ces différentes parties, au lieu qu’elle auroit dû y couler successivement, suivant l’ordre réglé par la nature ».

« Dans les diverses observations que j’ai faites sur un événement aussi singulier, j’ai remarqué, 1.o que, malgré les paillassons, la cloque prenoit aux pêchers couverts ; 2.o que l’exposition du couchant en étoit la plus maltraitée ; 3.o qu’elle n’arrivoit jamais dans un temps mou, brun, obscur, ni même après les pluies froides du printemps, ni après certaines gelées fortes durant lesquelles le soleil ne paroissoit point ; 4.o je n’ai jamais vu les pêchers brouis, cloqués lors des plus grands vents du nord, & les plus froids, si ce n’est qu’ils fussent rabattus sur l’espalier, par quelque toit ou bâtiment voisin, par un mur, par une montagne, &c. ; 5.o ces vents destructeurs soufflent du midi au couchant, en forme de tourbillons, & apportent avec eux des exhalaisons contagieuses, non-seulement aux plantes délicates, telles que les laitues placées sur des costières, les pois hâtifs, les melons, les concombres avancés sur couche ; mais aux plantes robustes, comme le lilas, le chèvrefeuille. Après la rosée qui accompagne ces vents, on trouve sur ces feuilles brouies, une humeur tant soit peu cotonneuse, qui est une humidité desséchée & coagulée, que les gens de la campagne appellent les fils de la bonne Vierge ; 6.o la cloque n’a jamais attaqué un pêcher, après ces vents de galerne, (vents nord-