Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 3.djvu/45

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son emploi, la grande chaleur qu’elle produit, la font préférer à l’usage du bois dans les forges, les manufactures, & même pour le chauffage. Des provinces & des Royaumes entiers où le bois est rare & fort cher, n’emploient pas d’autres substances combustibles ; heureux si en France l’on n’est pas obligé quelque jour d’y avoir recours uniquement pour tous les usages où le bois est employé ! Les manufactures y gagneront beaucoup & le chauffage peu. Parcourons les meilleurs moyens de se servir du charbon de terre pour l’agriculture, pour les arts & le chauffage.

Usage du Charbon de terre dans l’Agriculture. Il est très-peu d’objets dans la nature qu’un agriculteur intelligent ne sache convertir à son usage, & duquel il ne puisse tirer du profit, sur-tout quand il en connoît bien la nature & les principes. Rien n’est inutile, & tout devient un fonds de richesses ou de ressource quand on l’emploie à propos. L’espèce de glaise bleue ou noire que l’on rencontre ordinairement à l’ouverture d’une mine de charbon de terre, & que l’on doit regarder comme un charbon imparfait, répandue sur les prés & dans les terres fortes, est très-utile. Les sels vitrioliques & alumineux qu’elle contient se développent par les pluies & les rosées qui pénètrent la terre, & forment dans son sein, avec des sucs qu’ils rencontrent, des combinaisons nouvelles très-propres à hâter & fortifier la végétation. (Voyez le mot Ampélite) Toutes les cendres en général sont regardées à juste titre comme d’excellens engrais ; celles du charbon de terre, qui, à la vérité, peuvent n’être considérées que comme de la terre brûlée, ne sont pas pour cela sans propriétés, & les agriculteurs qui les emploient conviennent qu’elles fournissent un très-bon amendement dans les terres labourables. L’exemple des paysans des environs de Saint-Étienne, démontre cette vérité de pratique. Ils s’en servent, mêlées avec du fumier de bœuf & de vache, pour engraisser leurs prairies & leurs terres à blé. M. de Gensane dit qu’en les employant avec modération à l’engrais des mûriers, elles corrigeroient la trop grande ténacité de la séve sans être préjudiciables à la feuille & de-là aux vers à soie. C’est à l’expérience à faire valoir cette idée ou à la faire rejeter. En Angleterre, ces cendres sont du plus grand usage dans l’Agriculture ; mais on a très-grand soin de les choisir & de les approprier à la nature des terreins. La cendre de houille grasse est très-bonne pour l’engrais des marais, des potagers & autres terreins où l’on cultive les légumes ; celle de houille maigre est très-propre à fertiliser les prairies. De tous les produits de la combustion du charbon de terre, la suie est préférable pour l’engrais ; elle est excellente pour le foin & pour le grain. Dans le pays de Liège on l’emploie non-seulement pour fertiliser ce qu’ils appellent des terreins froids, mais encore en la répandant au pied des houblons, on fait périr une espèce d’insecte qui dévore toutes les années une grande quantité de feuilles de cette plante. En Angleterre on a la coutume d’en répandre quarante boisseaux par acre de terre (cent-soixante perches). Quelques terres en demandent davantage. Cet engrais produit un foin très-gras & très-doux, détruit les