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terre devant le soc, afin qu’il entre aisément sans éprouver une trop grande résistance, qui retarderoit la marche de la charrue : il ne suffit donc point qu’ils précèdent le soc, mais il faut encore qu’ils soient placés devant la partie du soc qui a le plus d’obstacles à surmonter en raison des frottemens. C’est une observation que Pline eût faite, si le soc de la seule charrue qu’il connoissoit avoit eu une forme semblable à celle qu’on donne aux socs de nos fortes charrues. Il n’est pas possible de donner une règle fixe & invariable pour la position du coutre à l’âge de la charrue ; elle dépend de quantité de circonstances qu’on rencontre dans la pratique, qu’il est difficile de prévoir : c’est au cultivateur intelligent à le placer de façon qu’il remplisse l’objet de sa destination. En général, quand la pointe du soc n’est pas assez inclinée à l’horizon, le coutre doit être placé plus en arrière, afin que le soc ait plus de prise. Si le soc au contraire est trop tourné en bas, ou qu’il soit trop long, la pointe du coutre doit se trouver un peu en avant de celle du soc, afin qu’il ne s’enfonce point trop. Quand la pointe du soc n’est pas assez tournée à gauche, il faut tourner le coutre de ce côté, afin qu’il ouvre la terre, & que le soc ne soit point renvoyé en éprouvant trop de résistance.

Par la position qu’il faut donner au coutre, on connoît si une charrue est bien construite. Lorsqu’elle est faite selon les règles, elle travaille parfaitement quand le coutre est presque dans le plan vertical de son mouvement progressif, & que sa pointe est tant soit peu au-dessus de celle du soc.

Quand le soc d’une forte charrue est à double aile, le premier coutre doit être placé devant la pointe du soc, les deux autres à gauche & à droite en devant de l’aile du soc, un peu plus en arrière que le premier. L’âge n’ayant pas toujours assez de largeur pour qu’on puisse placer les coutres à des distances convenables, on est obligé d’y ajouter de chaque côté un morceau de bois qu’on attache fortement avec des vis & des écrous aux deux côtés de l’âge, dans lequel on pratique une mortoise pour recevoir le coutre.

Communément le soc des fortes charrues n’a qu’une aile à droite, qui est le côté du versoir ; dans ce cas il faut placer les coutres vers la droite, parce que c’est la partie du soc qui éprouve toute la résistance ; si on ne facilitoit pas son entrure dans le sillon par le moyen des coutres, la charrue courroit risque de renverser à gauche, ne pouvant vaincre les obstacles qui s’opposent à sa marche, principalement dans les terreins qui sont compactes & tenaces. On place donc le premier coutre devant la pointe du soc, & les autres à sa droite, à des distances convenables & relatives à la largeur de son aile : par ce moyen le soc ouvre & soulève, en traçant son sillon, une terre déjà fendue par les coutres ; le versoir la jette sur le côté assez bien divisée, ou au moins en plus petites mottes que si la charrue n’avoit point de coutres.

Quand on donne un premier labour à une terre en jachère, les coutres deviennent indispensables pour l’effet de la charrue, quoique la terre ne soit pas extrêmement forte, parce que les ronces, les mauvaises herbes