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des charrues avec avant-train, ou sans avant-train.

Quoique toutes les charrues ne composent que deux espèces, fondées sur la différence des principes de leur construction ; afin de mettre de l’ordre dans la description que nous allons donner des charrues les plus connues, à cause de l’utilité qu’on en retire pour la culture des terres, selon les différentes qualités de leur nature, nous ajouterons une troisième espèce qui formera une classe séparée des deux autres, non point par rapport aux principes de sa construction, puisqu’ils sont les mêmes ; mais par rapport à son usage qui est différent, dans la culture, de celui des charrues des deux premières espèces. Nous nommerons cette troisième un cultivateur : enfin nous en établirons une quatrième, dont les principes semblent un peu s’éloigner de ceux sur lesquels les autres sont construites. Cependant ce sera toujours moins sur la différence des principes, que sur sa vraie destination, qui n’étant point du tout la même, demande d’être mise dans une classe séparée ; cette espèce sera appellée celle des charrues à défricher.

DEUXIÈME PARTIE.


CHAPITRE PREMIER.

Des Charrues simples.

La charrue simple est le plus ancien instrument de labourage que nous connoissions : c’est de cette espèce de charrue dont parle Virgile dans son premier livre des Géorgiques, où il donne le détail des instrumens propres à l’Agriculture. Pline le naturalise ne parle aussi que d’une seule espèce de charrue, qui n’avoit point d’avant-train, mais dont l’âge étoit portée sur le joug des bœufs, comme on le pratique encore aujourd’hui dans l’attelage de l’araire dont on se sert en Provence, en Languedoc & en Dauphiné. Il y a tout lieu de présumer que les anciens n’en connoissoient pas d’autre, & qu’avec cette seule espèce de charrue, ils labouroient indifféremment toutes sortes de terres. Il est très-probable que cette charrue d’une construction si simple, est le premier instrument de labourage qui ait été inventé ; ce qui confirme cette opinion, c’est qu’elle ressemble beaucoup à la charrue égyptienne que les romains avoient adoptée.

À mesure que l’Agriculture a fait des progrès, ou pour mieux dire, lorsque les hommes ont eu assez de courage pour s’élever au-dessus du préjugé honteux qui leur faisoit regarder les occupations champêtres comme indignes d’eux, ils se sont occupés à perfectionner les instrumens dont ils se servoient pour ouvrir le sein de la terre. La charrue simple, jusqu’alors en usage, parce qu’on n’en connoissoit pas de meilleure, n’a plus paru propre à cultiver indifféremment toutes sortes de terreins. Les obstacles produits par les frottemens considérables qu’elle éprouvoit dans les terres fortes, demandoient un attelage plus nombreux que quand il falloit cultiver des terres légères où le soc, éprouvant peu de résistance, entroit aisément pour ouvrir de larges & profonds sillons. Pour vaincre les frottemens, & afin que l’attelage tirât avec plus de facilité la charrue, on a imaginé de substituer au joug un avant-train