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composé de deux roues, qui, en supportant le poids de l’âge, donnoit encore l’aisance de tirer avec beaucoup moins de peine. De sorte que les chevaux ou les bœufs qui étoient obligés de porter l’âge en même temps qu’ils tiroient la charrue, étant débarrassés de ce fardeau, n’avoient plus d’autre peine que celle de tirer. La peine étant moindre, on pouvoit sans inconvénient diminuer l’attelage, ce qui rendoit l’Agriculture moins dispendieuse. De cette manière l’industrie a fait une charrue composée ou à avant-train, d’une charrue très-simple dans le principe, mais peu propre à la culture de toutes sortes de terres, sans distinction des différentes qualités de leur nature.

L’invention de la charrue à avant-train n’a point proscrit l’usage de la charrue simple : l’Agriculture a conservé cet instrument dont elle se sert encore avec avantage pour la culture des terres légères, qu’elle fouille & remue assez bien. Dans le Dauphiné, dans la Provence, où la plupart des terres sont assez légères & friables, c’est l’instrument de labourage le plus commun ; il n’y a que dans les cantons, ou les terres sont fortes & grasses qu’on emploie la charrue à deux roues. C’est un très-bon instrument d’Agriculture ; il ne s’agit que de le mettre dans des mains habiles, qui s’en serviront dans la plupart des terres labourables avec le plus grand avantage.

Tout le méchanisme de la charrue simple, consiste dans deux leviers l’un de la première, l’autre de la seconde espèce, qui ont un point d’appui commun, & agissent en même temps pour vaincre la résistance commune que le soc oppose à leur action ; de sorte que sa direction dépend de tous deux. Le premier levier est le manche assemblé avec le sep ; la puissance qui le fait agir, ce sont les mains du laboureur appliquées à l’extrémité du manche pour conduire la charrue ; son point d’appui est au talon du sep & sa résistance première à la pointe du soc : celles qui proviennent des frottemens du sep dans le sillon, ne sont que secondaires, parce qu’elles sont une suite du premier obstacle qu’éprouve le soc en fendant la terre.

L’âge ou la flèche, est le second levier ; il est de la deuxième espèce : la force des animaux, appliquée à l’extrémité, est la puissance qui le fait agir : son point d’appui étant le même que celui du premier levier, il se trouve par conséquent au talon du sep, auquel il est assemblé, s’il ne l’est pas avec le manche : la résistance se trouve aussi à la pointe du soc, puisqu’elle est commune à tous deux.

Le sep & le soc qui ouvrent le sillon, doivent être considérés comme le coin que ces deux leviers soutiennent & mettent en mouvement par l’action réciproque de leurs puissances qui agissent en même temps. Lorsque ces deux leviers sont en mouvement, leurs puissances faisant effort en même temps, le coin surmonte l’obstacle que lui oppose la pression de la terre qui est fendue & ouverte par le soc, soulevée & renversée de côté par le plan de la surface du versoir.

Section première.

Description de l’araire de Provence.

Nous commençons la description des charrues légères par celle qui est d’un usage assez commun dans les