Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 4.djvu/288

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assez les recommander. On percera donc, quand une bête à cornes est infectée de maladies contagieuses, la peau qui pend au-dessous de son col, avec une grosse aiguille d’acier, de la largeur d’un filet, enfilée d’une corde faite de sept à huit ligamens ou fils poissés qui ne soient pas retors ; on fera agir deux ou trois fois par jour cette corde enduite de l’onguent basilicum ; on la fera aller & venir dans l’incision, ayant soin de nouer ensuite les deux extrémités, afin que la corde ne sorte point de l’ouverture. Ce moyen est si salutaire, que je n’ai vu périr aucune bête à laquelle on a fait cette opération. On tiendra d’ailleurs les bêtes malades le plus proprement qu’il sera possible : on nettoiera régulièrement deux fois le jour les étables ; on enlèvera le fumier, & on l’éloignera même du village ; quand l’air sera sain, ou que le vent viendra du levant, on ouvrira les fenêtres de l’étable ; en cas qu’il n’y en ait point, on y en pratiquera. De six heures en six heures, le jour & la nuit, on parfumera les quatre coins de l’écurie avec du fort vinaigre, qu’on jettera sur des pierres ou des briques bien chaudes ; on peut aussi y faire brûler alternativement une bonne pincée d’un mélange composé de poudre à canon, de sel commun, de grains de genièvre & de bois de laurier concassés.

Pour garantir les bestiaux de la contagion, M. le Clerc dit qu’il faut d’abord que les chefs de communauté empêchent toute communication d’hommes & d’animaux avec la communauté qui est affligée de contagion ; c’est la précaution la plus essentielle : on infligera même les peines les plus graves à tous ceux qui enfreindront des ordres si sages ; & si l’on s’appercevoit que quelqu’un fût allé dans les lieux infectés, il faudroit le bannir d’avec les animaux du lieu sain qu’on veut garantir ; on a vu quelquefois des bêtes saines mugir & prendre la suite devant les personnes qui avoient été dans des lieux infectés, comme si effectivement elles avoient senti l’air contagieux qu’on leur apportoit. On évitera le commerce avec les bouchers & les tanneurs, dans un temps de mortalité ; on tiendra les étables bien propres, & on les parfumera souvent ; on pratiquera l’ouverture ou le cautère selon la méthode prescrite ci-dessus. L’expérience a prouvé que ces précautions guérissent les animaux malades : que n’en doit-on pas attendre pour les sains ? On frottera ensuite, & on étrillera les animaux sains, on leur lavera la bouche deux fois par jour, de même que les gencives, avec le remède & l’éponge que nous avons indiqués plus haut ; on éloignera des villages toutes les ordures, les fumiers : &c. on fera très-bien de mettre dans les écuries saines, ainsi que dans celles qui sont infectées, quelques chevaux avec les bœufs & les vaches : on a remarqué que la vapeur du fumier de cheval empêchoit les progrès de la contagion des bêtes à cornes ; on empêchera en outre le bétail de nager, d’aller à l’eau dans les lieux profonds & d’y rester long-temps ; on n’enverra point le matin les bêtes aux champs à jeun, principalement les jours de rosée ou de brouillards ; on attendra que le soleil ait dissipé l’une & l’autre ; on donnera pendant cet intervalle quelque chose à