Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 4.djvu/289

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manger aux animaux, quand même ce ne seroit que de la paille. Toutes ces précautions ne suffisent cependant pas encore, lorsque la maladie commence à se manifester dans un endroit.

Dès l’instant même qu’on s’apperçoit qu’une ou plusieurs bêtes sont affectées des symptômes contagieux, on doit les assommer sur le champ, les transporter dans un lieu désert, sans les écorcher, les mettre au milieu d’un tas de bois & les y faire brûler. On indemnisera cependant, en pareil cas, ceux qui supporteront ce dommage.

Si cependant la contagion s’annonce tout-à-coup, & si elle affecte tout à la fois un grand nombre d’animaux, ce conseil ne pourra se pratiquer : on séparera, en pareil cas, les bêtes saines, & on les éloignera le plus qu’il sera possible de celles qui seront malades. Les personnes destinées à soigner les malades, n’entreront point dans les étables de celles-ci ; & les étables de ces dernières ne communiqueront point avec les étables des premières. Le venin s’insinue aisément dans toutes les étoffes, & principalement dans celles de laine. La contagion peut facilement se transmettre par cette voie, comme la peste se communique par la soie, la mousseline & le coton. Cette précaution prise, on traitera les animaux infectés, selon la méthode ci-dessus indiquée, & on tâchera aussi d’en garantir les sains, en se servant des moyens dont nous venons de parler.

Dès qu’une Communauté se trouvera dans le voisinage d’un lieu infecté, elle doit bien se garder d’attendre que la mortalité arrive pour se prémunir de tous les secours préservatifs & curatifs : ils sont si simples, si faciles à trouver, & si peu coûteux, que la négligence sur cet objet seroit impardonnable, avec d’autant plus de raison que ces mêmes remèdes peuvent se conserver un très-grand nombre d’années dans un lieu sec, sans rien perdre de leur efficacité.

S’il périt quelques-unes des bêtes malades, on les enterrera profondément dans un lieu éloigné du village ; on battra bien les couches de terre qui les couvriront, de peur que les bêtes sauvages & les chiens n’aillent gratter & déterrer ces animaux ; au reste, les personnes qui auront soin des bêtes malades, ne doivent point avoir peur de gagner leurs maladies ; la contagion des animaux ne se transmet point aux hommes ; & si la mortalité a produit quelquefois de mauvais effets sur l’espèce humaine, c’est en écorchant les animaux infectés, c’est par la puanteur des charognes, c’est lorsque des gens, qu’on peut qualifier de scélérats, vendent en cachette, & à bon marché, de la viande des animaux attaqués. Il est facile de parer à ces inconvéniens : il suffit qu’une police exacte veuille bien y veiller, pour n’avoir rien à craindre de pareils accidens.

Quand la contagion aura entièrement cessé, on recommandera à toutes les personnes qui ont eu soin des bêtes malades, de quitter les habits dont elles se sont servies, & de les parfumer souvent avec du soufre, & de les pendre ensuite à l’air sous le toit. On évitera, en outre, de conduire les bestiaux dans les lieux où il y a eu contagion, avant l’échéance d’une année entière ; le venin reste long-temps caché dans le foin & la paille, & le