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ou six pouces d’eau de plus suffisent pour couvrir l’espace souvent de demi-lieue détendue ; 3°. tant que l’on conservera une certaine profondeur d’eau sur le bord de l’étang, cette eau ne se corrompra pas lors des grandes chaleurs ; 4°. Le fossé dont on aura enlevé la terre nécessaire à la construction de la chaussée, se remplira chaque année de vase, de débris de plantes, &c ; & si on n’a chaque année le Soin de le nettoyer de nouveau, il deviendra lui-même un foyer de corruption ; 5°. l’espace de terrein placé entre la chaussée & le continent, se rehaussera insensiblement, & peu à peu sera un terrein précieux gagné pour l’agriculture ; 6°. je conviens que le bled y végétera mal dans le commencement, à cause de la surabondance de sel ; mais on est assuré d’en retirer d’amples récoltes de soude, ou kali ou salicor, productions dont le débit est toujours assuré ; 7°. dès que cette terre aura été mise en valeur, labourée & cultivée, il ne s’élèvera plus de miasmes pestilentiels, ce qui est déjà un grand point ; 8°. les vagues accumulent toujours sur les bords des sables, les débris des animaux & des végétaux ; de manière que, petit à petit, la chaussée deviendra inutile ou presque inutile, puisque l’eau n’aura plus assez de profondeur à son pied. C’est le cas d’en commencer de nouvelles, & d’empiéter comme la première fois sur le fol de l’étang.

Je donne ces avis simplement comme des apperçus généraux, que chacun doit modifier suivant les circonstances locales & ses facultés. La règle d’après laquelle on doit partir, est que par-tout où l’eau a un pied ou deux de profondeur, elle ne se putréfie pas. On objectera la longueur de l’opération, la dépense, &c. ; je conviens de tout cela ; mais l’exemple des hollandais, je le répète, détruit toutes les objections possibles : ils ont tiré des fossés ou des canaux, la terre sur laquelle ils marchent & qu’ils cultivent. On peut mettre en problème, s’il y a plus d’eau que de terre en Hollande.

Section II.

Des Étangs formés par le débordement des grandes Rivières.

Consultez le mot Dessèchement. Il ne faut pas confondre avec le mot étang, ces bras de rivières formés par les crues, & qui ont une entrée & une sortie, & dont le fluide laissé par le débordement, s’abaisse par infiltration, à mesure que les eaux de la rivière décroissent : on ne sauroit y élever du poisson. Ces bras ont rarement une profondeur suffisante, & le poisson sait très-bien suivre le courant de l’eau lorsqu’elle diminue. Il n’en est pas ainsi de ces vastes & profondes flaquées d’eau, souvent occasionnées par le changement de lit de la rivière, auxquelles elle ne communique que dans les forts débordemens, mais où elle entretient perpétuellement une masse d’eau, au moyen de l’infiltration & du niveau. Ces étangs, mal à propos nommés ainsi, & où la main de l’homme n’a eu aucune part, ne sont pas des lieux à y élever du poisson, parce qu’on n’est pas assuré de l’avoir à sa disposition, à moins qu’on ait pris le parti indiqué au mot Dessèchement ; & malgré cela, on n’est point assuré que lors du déborde-