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derrière l’empalement, sera garnie de forts barreaux de bois, séparés les uns des autres d’un demi-pouce seulement. La partie opposée ou l’autre extrémité du canal, sera également terminée par des pierres de taille, afin de prévenir les dégradations. Dans quelques endroits, la maçonnerie qui soutient l’empalement, s’élève aussi haut que la chaussée, & la précaution est sage ; dans d’autres, les supports de l’empalement sont en bois : ce sont de bons & fort pilotis enfoncés avec le mouton, & liés les uns aux autres par des traverses. La première méthode est préférable ; la seconde est indispensable, lorsque les pierres dures sont rares ; mais elle est plus sujette à être détériorée, & à de grandes réparations.

Le canal une fois solidement établi, il s’agit d’élever la chaussée, de charier les terres, &c. ; ici les brouettes, (voyez ce mot) seront de la plus grande utilité. Avant de donner le premier coup de pioche, il convient de tracer sur toute la longueur que doit occuper l’étang, un large fossé qui, prenant de son extrémité la plus éloignée, corresponde à l’empalement, & ensuite tirer des lignes diagonales des côtés & correspondantes à ce grand fossé. La terre tirée de la partie des fossés les plus éloignés, sera la première enlevée & formera la base de la chaussée, & ainsi de suite, jusqu’à ce que l’on arrive à son pied qu’on appelle la poêle. À mesure que l’eau de l’étang s’écoule, le poisson se retire dans les fossés ; petit à petit il vient se rassembler dans la poêle où enfin il reste à sec.

Le diamètre en tout sens de cette poêle, doit être proportionné à celui de l’étang, c’est à-dire, qu’il doit avoir douze à vingt-quatre pouces par arpent. On peut même, dans cette poêle, en ménager une plus profonde & de beaucoup plus étroite, afin de rassembler promptement le poisson dans un lieu très-circonscrit. Ces deux poêles seront toujours, quelque profondeur qu’on leur donne, de niveau avec la base de l’ouverture du canal, afin que toute l’eau s’échappe par cette ouverture, & que le poisson reste à sec, pour enlever plus commodément le poisson.

Le second avantage de ces poêles & des fossés, est de dessécher dans la suite le terrein, lorsqu’on veut le convertir en champ, & de fournir la quantité de terre suffisante à la construction de la chaussée.

Le troisième, comme la poêle est plus creuse que le reste de l’étang, la colonne d’eau est plus considérable, & garantit par conséquent le poisson des funestes effets du froid & des gelées. Le grand fossé & les fossés latéraux qui aboutissent à la poêle, donnent aux poissons les moyens de s’échapper dans la poële, lorsqu’une gelée vive & subite glace la superficie de l’étang.

Il est bon, & même essentiel d’observer que les terres simplement remuées s’affaissent d’un pouce par pied, & que l’affaissement est beaucoup plus considérable lorsqu’elles ont été transportées ; ainsi, une chaussée destinée à avoir constamment huit pieds d’élévation, doit dans le principe être montée à la hauteur de neuf pieds. Sans cette attention, on se trouvera bien loin de compte ; à la fin de l’année il faudra l’exhausser de nouveau, & peut-être