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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 4.djvu/50

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La dyssenterie est maligne, lorsque les effets ne sont pas proportionnés aux causes, c’est-à-dire, lorsque les malades ne rendent qu’une portion très-petite de matières glaireuses & ensanglantées, tandis qu’ils éprouvent des mouvemens convulsifs dans les membres, & des syncopes répétées.

La cause première de la dyssenterie est une fausse inflammation du canal intestinal ; toutes les causes disposantes sont, la mauvaise constitution du sang & des humeurs qui sortent de son sein, les sabures, crudités & putridité de l’estomac, l’intempérance & la disette.

Les causes qui déterminent la dyssenterie, sont des coups reçus sur le ventre, l’intempérance, la suppression de quelques évacuations sanguines, l’usage immodéré des alimens de mauvaise nature, des fruits nouveaux, des liqueurs qui n’ont pas encore fermenté.

Avant l’apparition de la dyssenterie, le malade ressent des douleurs très-vives de coliques qui reviennent par intervalles, ces douleurs naissent de l’impression que font sur les intestins déchirés, les humeurs acrimonieuses qui passent sur ces petites plaies : dans la dyssenterie blanche, les matières sont coagulées & roulées sur elles-mêmes comme des oublis : dans la dyssenterie rouge, les matières sont d’une puanteur insoutenable ; les urines coulent en petite quantité, parce que la sérosité du sang s’échappe par le fondement ; le ventre est quelquefois élevé du côté du foie, quand ce viscère est attaqué, & alors les malades sont un peu jaunes, quelquefois le vomissement existe, & c’est ce qui a fait prendre la dyssenterie jour le Cholera-morbus.

La dyssenterie est une maladie grave qui, dans les campagnes & dans les armées, fait périr, lorsqu’elle règne épidémiquement, un très-grand nombre de victimes. D’ailleurs, si les malades ne succombent pas dans la force de l’attaque, ils traînent une vie malheureuse & souffrante ; les intestins languissent dans une foiblesse qui s’oppose à leur action ; & la nutrition, cette fonction qui seule entretient & fait la vie, est languissante pendant long-temps, & finit par cesser entièrement : les différens intestins sont attaqués de la suppuration, la fièvre lente s’empare du malade, & il succombe aux effets destructeurs de cette fièvre.

On a observé que la dyssenterie qui paroissoit à la suite de la jaunisse & du scorbut, étoit mortelle.

Les travaux forcés du corps & les peines de l’ame font dégénérer une dyssenterie simple en dyssenterie maligne & mortelle : la dyssenterie épidémique est la plus dangereuse de toutes, parce que, dans le temps de son apparition, on n’est pas encore instruit des causes qui la font naître, & que d’ailleurs, comme nous l’avons observé plus haut, c’est un Prothée qui prend toutes sortes de formes, & qui élude tous les moyens.

C’est un fort mauvais signe dans les dyssenteries, quand l’écoulement des matières est peu considérable, tandis que les autres accidens sont multipliés, quand le ventre s’élève ou se tend, quand le pouls se concentre, quand la langue se sèche, quand le vomissement paroît sur la fin de la maladie ; & lorsqu’il redouble dans la proportion que les urines diminuent ; lorsque la fièvre redouble le soir ; elle prend alors