Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 4.djvu/598

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effet. Nous pouvons assurer jusqu’à un certain point que nous connoissons la feuille ; presque toutes ses parties se sont offertes à nos regards, nos recherches nous ont conduit même jusqu’aux relations que ses différentes parties ont entr’elles ; nous savons qu’à l’endroit où le pétiole tient à la tige, il y a une petite tumeur, qu’il entre dans l’épaisseur de la peau, & qu’il y est enfermé comme un diamant dans le chaton d’une bague ; cette espèce de sertissure retient le pédicule, & c’est par la petite tumeur qu’il communique avec toute la plante. (Voyez Pétiole) Nous avons vu le pétiole composé de vaisseaux de nature diverse s’épanouir, se diviser, ses ramifications principales donner naissance à d’autres plus délicates, qui, à leur tour, finissoient par produire un réseau, dont les mailles étoient remplies d’une substance spongieuse ; nous avons vu cette substance composée d’une infinité de petits filets, perpétuellement imbibés de sucs, & recouverte d’un second réseau beaucoup plus délicat, chargé de glandes enveloppées d’un petit vaisseau ; nous avons vu une membrane transparente, envelopper ce brillant appareil. Voilà la machine connue, voilà les roues & les leviers ; les rapports que nous avons soupçonnés entre le réseau parenchymateux & le parenchyme, entre le parenchyme & les glandes corticales, entre les glandes corticales & leur réseau, entre ce réseau & l’épiderme ; voilà les communications entre toutes les parties, c’est par ces points qu’elles agissent les unes sur les autres. Mais où est le ressort qui les fait mouvoir ! quelle est la cause, le principe du mouvement ? Où est le premier mobile ? Ici nous nous arrêtons, & nous avouons de bonne foi que nous l’ignorons. Le même génie qui a dit à la matière sous forme animale, vis, croîs & multiplie, l’a dit pareillement à la matière sous forme végétale. Comme la toute puissance est un acte simple de sa volonté, la matière s’est animée ; nous voyons qu’elle vit, nous suivons ses actions, nous pouvons même calculer ses effets, mais nous ignorons comment & pourquoi elle vit. La recherche que nous en ferions, nous entraîneroit nécessairement dans des discussions & des raisonnemens inutiles, & d’autant plus inutiles qu’ils nous éloigneroient de la vérité. Contentons-nous donc d’étudier les phénomènes de la nature, sans en vouloir découvrir la première cause. Ils sont si multipliés, si grands, si élevés qu’ils sont dignes de nous fixer & de nous satisfaire.

La feuille vit comme les autres parties de la plante, elle a des mouvemens particuliers & des fonctions propres ; comme être vivant, elle a son développement & son accroissement, & par conséquent son décroissement qui la conduit insensiblement à la mort. Mais comme être vivant, elle n’est pas sur la terre pour être inutile ; elle doit donc être utile pendant sa vie & après sa mort : ainsi nous allons considérer la feuille sous ses divers rapports ; 1°. la feuille vivante & ayant des mouvemens particuliers ; 2°. la feuille pompant dans l’air la sève descendante 3°. la feuille organe de secrétion ; 4°. sa mort, sa chute & son utilité après sa mort.

§. I. Vie de la feuille & ses mou-