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Cette opération se fait en automne, au moment que les feuilles vont tomber, & dans le même temps, on supprime toutes les figues qui restent sur l’arbre. Si l’extrémité des pousses n’est pas encore mûre, elles ne mûriront pas en hiver & elles pourriront ; c’est le cas de retrancher ce bois incomplet, & de recouvrir la plaie. On peut cependant laisser ce bois sur pied, & attendre le retour du printemps pour enlever ce qui sera desséché. Ces soustractions quoique forcées, sont toujours préjudiciables, parce que le figuier porte son fruit au sommet des branches. Lorsque le nombre des tiges qui s’élancent de la souche devient trop fort, on retranche celles qui sont nues, ou qui sont le plus dégarnies de branches latérales.

La sensibilité de cet arbre, & la rigueur du climat sous lequel il se trouve étranger, nécessitent à le préserver des gelées ; à cet effet, on détache les branches de l’espalier, on les environne avec de la paille qu’on assujettit avec de l’osier ; afin que les vents, ou telle autre cause, ne la dérangent pas, & l’on chausse le pied avec du fumier, de manière que tout l’arbre est empaillé depuis le haut jusqu’en-bas. Quelques personnes rattachent de nouveau ces branches contre le mur, & étendent encore de la paille longue par-dessus, afin que l’eau des pluies glisse sur elle, & ne pénètre pas celle qui enveloppe les branches ; d’autres abaissent ces branches contre terre, & les chargent de paille, La première méthode est à préférer ; on observera, autant qu’on le pourra, de ne point endommager ni forcer les bourgeons en les rapprochant des mères branches, afin que la paille les couvre mieux & les touche par tous les points.

On a vu plusieurs fois, dans les hivers rigoureux, que lorsque les enveloppes faites avec de la paille, avec des cosses de pois, &c. étoient pénétrées par l’humidité, & que le grand froid survenoit avant qu’elle fût dissipée, le tout ne formoit plus qu’une masse de glace, & le tronc & les branches périssoient. Les habitans d’Argenteuil, pour prévenir ces fâcheux contre-temps, ont une méthode qui mérite d’être plus connue. Dans le courant du mois de Décembre, ils couchent en terre toutes les branches des figuiers, & assez profondément afin de les mettre à l’abri des gelées ; mais ils conservent une égale quantité de figuiers, & les enveloppent de paille, ainsi qu’il a été dit ; & par cette sage prévoyance, ils sont assurés de ne perdre qu’une des deux parties des figuiers, tandis que les autres jardiniers les perdent souvent en totalité. Dans les hivers secs & froids, ils sont assurés de sauver les figuiers enterrés ; ils les perdent lorsque l’hiver est mou, doux & pluvieux ; mais ils conservent les autres.

Pour les arbres en buissonnier, on fait la même opération, c’est-à-dire, que l’on commence à fixer les petites branches contre la branche ou tige-mère, on l’investit de paille, & ainsi successivement pour toutes les tiges, depuis le haut jusqu’au bas. Après qu’elles sont toutes empaillées, on fiche tout autour de l’arbre, des tuteurs forts & d’une hauteur proportionnée à celle des tiges, & on assujettit chaque tige contre ce tuteur. Si elles sont trop multipliées, & qu’on n’ait pas à sa disposition le nombre de tuteurs suffisans ; on se contentera d’en planter quelques-uns de plus forts que les précédens, & au moyen d’une corde ou des osiers, &c. on réunira, autant que faire se pourra, toutes les branches en faisceau, & on le fixera par les tuteurs ; ces précautions sont indispensables, non-seulement contre le froid, mais pour empêcher que les tiges ne succombent sous le poids de la paille, de la pluie & de la neige.

Dès qu’on ne craint plus les rigueurs de la saison, on commence par découvrir le pied jusqu’à une certaine hauteur, peu à peu les tiges, enfin les bourgeons & lorsque tout l’arbre est remis en liberté, on travaille largement la terre tout autour. À cette époque il faut supprimer tout le bois mort, rattacher les branches, les bourgeons contre le mur, & en écarter celles du buissonnier. Si des branches sont trop nues, c’est le cas de les pincer, afin d’avoir des pousses latérales.

III. Du figuier destiné à donner des