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tombent aussi dans peu de temps. Les paysans connoissent si bien ces précieux momens, que tous les matins en faisant leur revue, ils ne transportent sur les figuiers domestiques que les orni bien conditionnés, autrement ils perdroient leur récolte. Il est vrai qu’ils ont encore une ressource quoique légère, c’est-à-dire, de répandre sur les figuiers domestiques l’ascolimbros, plante très-commune dans les îles, & dans les fruits de laquelle il se trouve des moucherons propres à piquer ; c’est le cardon de nos jardins. Peut-être que ce sont les moucherons des orni qui vont picorer sur les fleurs de cette plante. Enfin, les paysans ménagent si bien les orni, que leurs moucherons font mûrir les fruits du figuier domestique dans l’espace de quatre jours. »

» À Malthe on caprifie, mais deux espèces seulement, dit M. Godheu de Riville ; voyons ce qui peut avoir donné lieu à cette opération, tandis que les autres espèces n’ont pas besoin de ce secours pour bien mûrir. Il est certain que le figuier de la première espèce, qui a produit une quantité de figues grosses & succulentes, se trouve, pour ainsi dire, épuisé. Cet arbre n’a pas la force de fournir la nourriture suffisante aux secondes figues qui commencent à paroître dans le temps que les premières sont dans leur maturité. Qu’arrive-t-il ? La moitié de ces secondes figues, qui ne reçoivent point le suc nourricier dont elles ont besoin, tombent avant d’être mûres, & c’est par la caprification qu’on remédie à cet inconvénient. L’introduction du moucheron y cause une fermentation capable de précipiter leur maturité, comme il arrive dans les fruits verreux qui mûrissent toujours avant les autres. Pour lors les figues qui tarderoient deux mois à mûrir, sont bonnes à manger trois semaines plutôt, & le temps de leur chute étant prévenu, la récolte en est plus abondante. Cela est prouvé par la manœuvre de quelques particuliers qui, pour ne point fatiguer leurs arbres, ne caprifient point les secondes figues, attendu que la récolte des premières est ordinairement mauvaise pour l’année d’après, l’arbre ayant, pour ainsi dire, été forcé de nourrir une trop grande quantité de fruits pendant la même année. En effet, les trois quarts des secondes figues tombent avant de mûrir, lorsqu’elles n’ont point été caprifiées, & il n’en reste sur l’arbre que le nombre qu’il est capable de nourrir. »

» J’ai dit que la récolte en est fort abondante ; & cela est si vrai, qu’on trouve plusieurs figuiers dont on ne voit point les branches, attendu la quantité de fruits dont elles sont chargées. La caprification prévient leur chute. »

On peut opérer la caprification d’une manière plus simple, remplir les fonctions de l’insecte & hâter de trois semaines la maturité des figues : tout le merveilleux consiste à toucher légèrement avec une petite goutte d’huile, l’œil ou le point central de la figue.


CHAPITRE V.

De la Cueillette du Fruit.


La récolte de la figue dans plusieurs cantons des provinces méridionales, est aussi précieuse que celle des oliviers & même de la vigne,