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CHAPITRE IV.

Des attentions avant de mettre le Foin dans les greniers.

Le premier soin est de faire balayer rigoureusement les murs & les planchers des greniers, & de faire enlever les graines & les ordures. On se contente communément de les faire tomber par la trappe dans l’auge, & de l’auge dans le fumier ou paille qui sont sous les bêtes. Lorsqu’on nettoie l’écurie, le fumier est porté dans le monceau général, & voilà d’un seul coup une masse énorme de mauvaises graines qui prospéreront à merveille dans le champ auquel le fumier est destiné. Le parti le plus sage est de les descendre du grenier dans des draps, de les porter dans un lieu écarté, & d’y mettre le feu.

Le second est de ne jamais laisser du vieux fourrage dans le grenier, & encore moins de le recouvrir par le nouveau. S’il en existe, c’est une preuve qu’on a eu au-delà de la consommation ordinaire, & il est probable que l’année suivante, en faisant les mêmes provisions, on retrouvera cet ancien foin, & d’année en année, il tiendra une place inutile, & finira par se réduire en poussière.

Les planches d’un grenier à foin doivent au moins être à languettes & fortement liées ensemble, afin que la sécheresse ne les sépare pas, & que les graines & la poussière ne tombent pas sur les animaux, & ne se mêlent pas avec le fumier.

La plus essentielle des attentions est de ne jamais fermer du foin qu’il ne soit parfaitement sec. Le propriétaire doit s’en convaincre par lui-même, & ne s’en jamais rapporter à son maître-valet ni à d’autres, qui ne voient jamais que le moment présent. Pour peu que le foin soit humide, il s’échauffe, il fermente, & dès-lors il devient une nourriture détestable pour toute espèce d’animal. L’on cherche souvent bien loin la cause des maladies, de la mortalité, & elle tient presque toujours au manque de prévoyance.

Voilà sans doute un grand mal ; mais il en existe un encore plus grand ; c’est l’embrasement spontané d’une masse de foin ; on court au remède, on appelle du secours lorsqu’il n’est plus temps. Bien des gens traiteront cette crainte de terreur panique, & ils auront tort ; deux exemples que j’ai vus, m’ont démontré la réalité d’un fait dont la raison seule suffit pour en démontrer la possibilité. Rien ne peut éteindre un pareil feu, parce qu’il ne se manifeste au dehors que lorsque tout le centre est embrasé, & prêt à jeter des flammes dès qu’il y aura un courant d’air.

Dans tout état de cause, il est indispensable de tenir ouverte la trappe qui communique avec l’écurie, & de pratiquer beaucoup de fenêtres dans la fénière, dont on ouvrira les volets à volonté. Il régnera perpétuellement un courant d’air, qui facilitera l’évaporation de d’humidité : malgré ces précautions, ne fermez jamais du foin que lorsqu’il sera bien sec.

Ce que je dis du foin destiné au grenier, s’applique également aux meules. Quoique l’air circule tout autour, souvent le centre s’échauffe & fermente.

Il y a plusieurs moyens de parer à cet inconvénient. On peut mettre un