Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 4.djvu/93

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une once & demie ou à peu près trois cuillerées à café d’extrait de saturne par pinte d’eau ; purgez une seconde fois, si l’écoulement subsiste long-temps, ou aussitôt qu’il aura cessé, mais à quinze jours au moins de distance de la première médecine ; lavez alors la jambe de temps en temps avec la lie de vin tiède ou une forte décoction de plantes aromatiques ; continuez ces lotions long-temps après la guérison pour fortifier toutes ces parties contre l’abord des humeurs ; ayez sur-tout la plus scrupuleuse attention à éloigner toutes les causes qui pourroient y donner lieu.

Si le sujet a acquis un certain âge, qu’il soit gras, naturellement mol, chargé d’humeur, peu exercé, & que le mal ait déjà fait quelques progrès, supprimez une partie de sa nourriture, mêlez du son avec son avoine ; exercez le plus souvent, lavez les parties malades avec l’eau de savon, & ensuite la décoction d’herbes émollientes jusqu’à ce qu’elles soient bien nettoyées, & que l’âcreté de l’écoulement soit diminué ; passez un séton à la partie postérieure & un peu interne de chaque fesse, si c’est aux extrémités postérieures, & à la face interne de l’avant-bras si c’est aux antérieures, ou placez un séton à l’angloise sous la poitrine :[1] la suppuration établie, employez pour les jambes les lotions faites avec la décoction des plantes aromatiques & les orties : quelques jours après, ajoutez-y l’extrait de saturne ou délayez-y de l’ægyptiac, la suppuration des cautères sera en raison de la diminution de l’écoulement des jambes ; lorsqu’elle commencera à être moindre, purgez avec l’aloès & le jalap donnés en bol dans le miel ; vous pouvez employer alors l’eau jaune des maréchaux, elle réunit le double avantage de resserrer & de fortifier. Si son effet est insuffisant, ayez recours à la dissolution de sublimé corrosif, ou à celle d’arsenic, étendue dans une infusion aromatique ; vous en proportionnerez la dose à la force de l’écoulement, en commençant toujours par la plus foible ; laissez subsister les sétons quelques temps après le dessèchement des eaux ; n’en ôtez qu’un à la fois, s’il y en plusieurs ; purgez une seconde fois après la cicatrisation des ulcères qu’ils avoient occasionnés ; lotionnez les jambes avec le vin chaud, afin de fortifier les parties comme je l’ai dit ci-devant : la teinture d’aloès est excellente ; ici on peut la faire à peu de frais avec l’aloès caballin dans le vin.

Donnez pendant le cours de ce traitement, excepté dans le temps des purgations, quelques diaphorétiques, tels que la poudre des bois, ou le

  1. On incise la peau longitudinalement, en suivant la direction du sternum, d’environ deux ou trois pouces ; on la détache du tissu cellulaire, tout autour de l’incision, avec les doigts ou le côté large de la spatule ; on a un morceau de cuir plat & doux, rond, d’environ trois à quatre pouces, percé dans son milieu d’un trou rond, d’à peu près un pouce ; on l’introduit sous la peau, de façon que le trou réponde à la fente. Si l’on craint qu’il ne tombe, on fait un léger point de suture dans le milieu ; bientôt l’engorgement l’empêche de s’échapper. Beaucoup de personnes préfèrent ce séton, parce qu’on ne le voit pas, & qu’il est moins exposé aux accidens qui peuvent arracher les autres.