Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1784, tome 5.djvu/248

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avant le temps marqué par les signes qui viennent d’être décrits, loin d’obtenir ce que l’on désireroit, on irriteroit, on accéléreroit ou l’on augmenteroit l’inflammation. Il est cependant quelques purgatifs que l’on peut mettre en usage dans tous les temps de la maladie, qui loin d’irriter sont adoucissans, & qui peuvent même, en quelque manière, être regardés comme antiseptiques : tels sont l’huile de lin, la manne, la casse, les tamarins, le nitre, la crème de tartre, &c. Ces purgatifs conviennent sur-tout lorsqu’on a perdu les premiers jours de la maladie sans procurer des évacuations. Telles sont les attentions que l’on doit avoir pour remplir la seconde indication, qui consiste à évacuer les matières putrides.

On remplira la troisième indication, en réparant le mal que les matières putrides auront causé, en redonnant aux solides leur ton, aux fluides leurs qualités ; on y parviendra en administrant le quinquina, la petite centaurée, l’absinthe, la germandrée, la gentiane, la chicorée sauvage, la myrrhe, le camphre, la gomme-ammoniac, après avoir suffisamment évacué les matières putrides.

Si enfin, la putréfaction a tellement altéré les solides, que leur ressort soit perdu, s’ils sont devenus des instrumens inutiles, dont la nature ne puisse presque plus se servir ; si la machine tend à sa destruction ; si l’odeur des évacuations & de l’haleine des animaux malades annoncent que la putréfaction est portée su plus haut point. Dans cette fâcheuse extrémité, l’art a bien peu de ressources, parce que la nature lui en fournit peu. Réveiller & soutenir les forces par les stimulans, les vésicatoires, les cordiaux les plus puissans, sur-tout par les alexipharmaques & les aromatiques ; administrer les boissons froides, leur réunir les acides les plus puissans, sur-tout l’acide vitriolique, qui par sa qualité astringente est propre à suspendre le progrès & les effets de la putridité ; donner le quinquina à grandes doses & répétées plusieurs fois par jour, tels sont les secours que l’on peut tenter dans une extrémité aussi pressante ; s’ils ne sont suivis d’aucuns succès, la putridité contenue dans les premières voies, les gangrenne, & donne la mort au sujet qui en est atteint.

III. Les animaux ne sont que trop souvent les victimes de ces maladies où la masse du sang est elle-même dans un état de putridité qui donne lieu à la gangrène.

On ne peut douter de la vérité de cette proposition ; car si l’on tire du sang des animaux qui sont attaqués de quelques fièvres putrides, malignes, on reconnoît qu’il est non-seulement d’une odeur fétide, mais putride & dissous ; il est même quelquefois si puant, sur-tout dans les fièvres malignes, qu’à peine en peut-on supporter les exhalaisons. La corruption de toutes les sécrétions & de toutes les excrétions que l’on remarque dans la plupart des maladies épizootiques & enzootiques, par l’odeur fétide du sang nouvellement tiré, par la couleur tannée de sa sérosité, & par la dissolution du coagulum, prouve qu’il est réellement putride ; son état de pourriture peut provenir de la putréfaction des matières contenues dans les premières voies, de la suppression de la transpiration