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capables de recevoir la greffe quand le tronc sera formé, pour sa hauteur & pour sa bonne constitution.


Section III.

Des précautions à prendre, afin de ft procurer des Greffes sûres.


I. Du temps de cueillir les greffes. Plusieurs auteurs conseillent pour la greffe en fente, pour celle en croix, entre l’écorce & le bois, & : pour la pousse, 1°. de faire choix des rameaux sur lesquels on doit lever les greffes, dès le mois de décembre, ou dans les beaux jours de l’hiver, lorsque l’on taille les arbres ; 2°. de ficher en terre ces rameaux par leur gros bout, de bien plomber la terre tout autour, & de la tenir fraîche. Comme les pluies sont fréquentes dans cette saison, & qu’il y a peu d’évaporation, un sol exposé au nord n’exigera aucune irrigation, & conservera la fraîcheur de ces rameaux.

D’autres conseillent de les planter dans une courge, dans des pommes ; le premier parti est plus sûr : enfin, de les planter en terre dans une cave, & loin des soupiraux, afin que le grand air ne les hâle point.

Je ne vois aucun avantage réel dans l’une ou l’autre de ces pratiques. En effet, le rameau ne se conserve-t-il pas mieux sur l’arbre que lorsqu’il en est séparé ? Il est plus avantageux de s’en rapporter a la nature. Pourquoi ne pas laisser sur l’arbre le nombre des rameaux dont on aura besoin au renouvellement de la sève ! Les pépiniéristes seuls en ont besoin d’un grand nombre, & ce grand nombre multiplieroit les plaies au moment de l’ascension de la sève, si on attendoit cette époque pour les abattre. Voilà le seul cas où l’on doive mettre des rameaux en réserve ; mais le particulier qui a besoin de quatre ou de six arbres de la même espèce, en trouvera les écussons sur un ou sur deux rameaux tout au plus : alors recouvrant avec l’onguent de Saint-Fiacre, les plaies qu’il aura faites, il n’y aura pas évaporation de la sève ; on aura des greffes fraîches, & dont la végétation sera analogue à celle des sujets à greffer, puisque les rameaux auront éprouvé les mêmes intempéries que les arbres.

Si cependant on a des envois à faire d’une certaine quantité de greffes, ou à en demander, il convient dans ce cas de s’y prendre d’avance, sur-tout si elles doivent venir du nord au midi, ou du midi au nord, parce que la végétation ne seroit plus égale à cause de la différence des climats.

La première attention à avoir, est de rassembler les rameaux de chaque espèce en petits paquets séparés, étiquetés, & liés ensemble ; de les enfoncer dans de la cire molle, & encore mieux dans de l’argile fraîche, mêlée & pétrie avec de la bouse de vache, qui lui empêchera de se gercer ; enfin de recouvrir cette terre ou cette cire avec la mousse, ainsi que les rameaux, d’assujettir le tout avec de la paille, du jonc ou de la ficelle, &c. & de placer le tout dans une boîte.

II. De la place du rameau fut laquelle on doit lever l’écusson. Si on examine les yeux d’un rameau quelconque, on verra qu’ils ne sont pas tous égaux, & pour la forme & pour la grosseur ; ceux du sommet