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la bière[1]. La bonne qualité du houblon est d’être un peu moîte au toucher, d’avoir une odeur agréable, & une couleur bien conservée ; il faut encore qu’il soit abondamment garni de feuilles, de fleurs, & de graines, & qu’il donne une très-grande quantité de matière extractive à l’eau.

Comme il arrive souvent que le houblon manque de quelques-unes de ces qualités, soit parce que la saison ne lui a pas été favorable, soit parce qu’on le fait sécher sans soins, alors on est dans l’usage de l’exposer à la vapeur de soufre qu’on brûle pour lui restituer sa couleur. Il est donc bien essentiel de ne pas s’en tenir à la belle apparence, il faut encore invoquer le secours de l’odorat ; car on ne sauroit être trop circonspect dans le choix du houblon, puisque celui qui est brun & mal léché, est très-préjudiciable à la bière blanche.

On préfère assez ordinairement le houblon nouveau à l’ancien, en les supposant tous deux d’égale qualité ; cependant le houblon de l’année précédente n’est pas à dédaigner lorsqu’il a été bien séché & conservé. Ainsi ceux qui en consomment une très-grande quantité, ne courent aucun risque d’en faire une ample provision, lorsque la récolte a été riche, & le prix modique.

Non-seulement le houblon prévient la tendance naturelle de la bière à l’acescence, mais c’est encore une espèce d’assaisonnement qui rend cette boisson plus agréable, plus digestive, plus salutaire & plus durable. Tous les amers ont en général la propriété de rendre les corps auxquels on les associe, plus susceptibles de se conserver. C’est même un fait connu des brasseurs, qu’on peut substituer avec quelque succès au houblon, la racine de gentiane, la petite centaurée, le chamædris ou petit-chêne ; cependant le houblon mérite la préférence à cause de son agrément. Ils savent encore que le roseau odorant, ou calamus aromaticus est quelquefois employé en Angleterre à la place du houblon ou avec le houblon lui-même, lorsque son prix en est plus haut, & l’expérience a appris qu’on en épargnoit environ un sixième.

La quantité de houblon qu’on a coutume d’employer, varie selon sa force, & celle de la bière que l’on prépare, ainsi que de l’espèce de grain dont on sert, du temps qu’on a intention de garder la liqueur, & du lieu où l’on doit la transporter. Toutes choses égales d’ailleurs, la bière brassée pendant l’été, exige une plus grande quantité de houblon que celle que l’on brasse au printemps & en automne ; il en faut moins en hiver que dans tout autre saison.

On a prétendu qu’il falloit nécessairement faire bouillir le houblon avec le moût, pour extraire plus de principes, & mieux les incorporer. M. le Pileur d’Applìgny, qui vient de publier de bonnes instructions sur l’art de faire la bière, a prouvé que cette boisson étoit

  1. Cet Article nous a été communiqué par M, Parmentier.