Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1784, tome 5.djvu/560

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

De toutes les manœuvres capables d’altérer & de nuire à la juste proportion des principes, & à la bonne qualité des huiles, la pire & la plus détestable à éviter est la méthode employée dans plusieurs provinces. On y met environ une livre d’eau sur une mesure qui contient cinquante livres de froment, poids de marc ; on fait fortement échauffer cette pâte dans un vaisseau de cuivre, torréfier même avant de la mettre au pressoir pour en tirer l’huile, comme s’il ne suffisoit pas de l’exprimer simplement. Je sais qu’en hiver elle coule moins facilement ; mais ayez de bons pressoirs, de bons moulins, à la manière des hollandois, (voyez ce mot) & vous obtiendrez des huiles vierges ; servez-vous d’un peu d’eau chaude pour les dernières pressées, & suivant la force du pressoir, vous retirerez toute l’huile ; mais si absolument vous désirez en retirer jusqu’au dernier atome, servez-vous du moulin de récensse, qui sera décrit ci-après. Cependant, comme la construction de ce moulin est dispendieuse, & qu’il est essentiel de se servir de ceux qu’on a, je conseille de supprimer la torréfaction, mais de faire chauffer les plaques du pressoir par l’intermède de l’eau bouillante ; de ne torréfier qu’à la troisième ou quatrième pressée, & de ne point mêler ce produit, parce qu’il est d’une qualité très-inférieure aux autres fournis par les pressées précédentes. Lorsqu’on emploie la chaleur pour obtenir tous les produits, le premier est une huile déjà rance sortant de la presse, ce que la digestion avec l’esprit de vin démontre ; elle y donne une teinture qui blanchit l’eau.

Outre les qualités mauvaises que l’on donne à l’huile par une fausse manipulation, elle porte en elle-même des vices essentiels, ainsi qu’on l’a vu ; mais elle a encore d’autres défauts qui lui sont communiqués par le sol où la plante croît, sans parler même de celui qu’on appelle goût de terroir. Plus le climat & la saison sont chauds, plus les graines contiennent d’huile essentielle, & par conséquent, plus de rancidité. Il en est ainsi de ces semences, lorsque la plante végète dans une terre sèche, sablonneuse, caillouteuse. Si la terre ou la saison sont trop humides, il y aura peu d’huile, elle sera trop mucilagineuse, & la graine sera très émulsive pour peu qu’on ajoute de l’eau dans la fabrication de l’huile. Ces objets doivent être pris en considération & prévus par ceux qui désirent faire de la bonne huile.


Section II.

De la récolte des noyaux & fruits à Huile.


§. I. De celle des noyaux.


On conçoit aisément que ce que je viens de dire s’applique aux noyaux & aux olives. Il convient de conserver l’amande dans sa coque presque jusqu’au moment où l’on veut la porter au moulin, & alors de se hâter de casser cette coque, de la séparer de ses débris, & fermer les amandes, les noix, &c. dans des sacs. Il est impossible, en cassant les coques, de ne pas attaquer un grand nombre d’amandes ; toutes les amandes dont l’écorce est divisée, & toutes celles qui sont brisées, ne tar-