Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1784, tome 5.djvu/738

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toute son étendue, & par conséquent, l’eau désignée par de petites flèches, se propagera d’un bout à l’autre. Lorsqu’elle sera arrivée à l’extrémité de la table, alors l’ouvrier armé de son essade, Fig. 3, tire de H en F, la terre qui bouche la rigole entre l’ados 1 & 2 ; l’eau suit cette rigole, & arrose les plantes, ainsi qu’on le voit entre 3 & 4. Lorsque la quantité d’eau est suffisante dans la rigole 3 & 4, il ouvre celle de 4 & 5, & tire la terre qui la bouche de G en H, de la même manière qu’il avoit ramené celle des portes d’écluse FF. L’essade est placée dans le plan, de manière que d’un seul coup elle puisse retirer la plus grande partie de la terre qui doit former la porte d’écluse. Après en avoir ramené une quantité suffisante de terre pour intercepter le cours de l’eau & la forcer d’entrer dans la rigole 4 & 5, il passe le plat du fer de l’essade contre cette terre nouvellement remuée, la lisse, la presse & la serre, afin que lorsqu’il la faudra changer de place, elle soit liée, & forme un corps solide. Par ce moyen, d’un seul coup d’essade il enlèvera, dans la suite, tout le monceau qui servira ou à boucher une partie de la rigole générale, ou l’ouverture de la rigole partielle dont elle a été tirée. Après avoir rempli la rigole 4 & 5, le monceau de terre G reste dans la même position que les monceaux FF. Il opère ainsi pour les rigoles 5 & 6, 6 & 7, &c. &c, jusqu’à ce qu’il soit parvenu au sommet de la table, & d’où vient l’eau.

Voilà toutes les rigoles partielles ouvertes, & la rigole générale touchée, à toutes les entrées des rigoles partielles, comme on le voit en FF ; la seconde irrigation sera donc l’inverse de la première. Lorsque l’ouvrier donne l’eau, & lorsqu’elle est parvenue au haut de la table, elle coule naturellement dans la première rigole partielle, puisqu’elle est ouverte. Lorsqu’elle a assez d’eau, d’un coup d’essade l’ouvrier la bouche, comme on le voit en G ; il remplit ensuite la seconde petite rigole, la bouche, & passe à la troisième, quatrième, &c., en répétant toujours la même opération, jusqu’à ce qu’il soit parvenu à la dernière extrémité de la table : alors, toutes les rigoles partielles se trouvent bouchées, & la rigole générale entièrement ouverte. La troisième irrigation est la répétition de la première, puisqu’on la commence par le bas, & la quatrième est la répétition de la seconde, puisqu’on la commence par le haut, & ainsi de suite.

Il faut beaucoup d’eau pour arroser ainsi un jardin d’une certaine étendue, puisque c’est un ruisseau que l’on promène sur sa superficie ; mais aussi quand elle ne manque pas, le travail que fait un seul homme étonne, & celui de 10 à 20 personnes armées d’arrosoirs, ne sauroit lui être comparé. Elles humecteroient la superficie de la terre ; dans la nuit toute l’humidité seroit évaporée, & il faudroit, le lendemain même, recommencer l’arrosement ; au lieu que celui de l’irrigation suffit pour 3 à 4 jours dans la saison la plus dévorante par sa chaleur.

Ces irrigations répétées, serrent la terre, & la compriment au point que si la plante est délicate, sa végétation deviendroit laborieuse à la longue. D’ailleurs, les mauvaises herbes ne tarderoient pas à se mul-