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être pourvues de membranes, & ces membranes pourroient être des muscles où résidèrent une irritabilité assortie à la nature du végétal. Ce seroit donc les trachées répandues dans les parties sexuelles qui y opéreroient ces jeux variés qu’on y admire… Il faudroit observer au microscope les trachées des plantes dans d’autres parties que les fleurs, dans les jeunes pousses des arbres, par exemple, & tenter sur ces parties, en différens temps, des expériences semblables à celles qu’on a exécutées sur les parties sexuelles. Suivant la conjecture que je hasarde, les trachées ne seroient donc pas seulement les poumons de la plante, elles en seroient encore les muscles, & ces muscles influeroient sur les mouvemens des tiges & des feuilles, comme sur ceux des parties sexuelles. Je n’affirmerois pas, néanmoins, que les trachées soient les seules parties irritables de la plante ; car l’irritabilité pourroit résider encore dans d’autres vaisseaux ».

Les parties sexuelles des plantes paroissent être celles où on a reconnu l’irritabilité au plus haut point. Les deux observateurs qui ont poussé le plus loin les recherches dans ce genre, sont M. Gmelin, à Saint-Pétersbourg, & M. Corolo, en Italie. Le premier fit des expériences sur les étamines d’un grand nombre de plantes, & dans presque toutes, il trouva des signes plus ou moins certains d’irritabilité. Les étamines des orchis lui offrirent le premier exemple. Ces étamines fraîches encore & brisées dans un lieu chaud, lui parurent se contracter & se relâcher alternativement, & éprouver ensuite une espèce de trémoussement. D’autres exemples, plus frappans encore, lui ont été offerts par ces fleurs que les botanistes nomment composées, telles que celles du chardon, de la jacée, de la centaurée, &c. L’étamine touchée avec la pointe d’une aiguille se contractoit en dessous. Les filets auparavant presque droits, se courboient de manière à imiter un muscle qui entre en contraction ; le stile, jusqu’alors emprisonné, s’élançait au dehors, par la contraction de l’anthère, & se chargeoit, en passant, de la poussière fécondante. Les filets laissés à eux-mêmes s’étendoient de nouveau en ligne droite, puis se contractoient encore pour se relâcher ensuite ; enfin, l’on voyoit succéder quelques oscillations.

Des différentes observations faites fur plusieurs plantes, M. Gmelin tire deux remarques importantes ; la première, que l’irritabilité se manifeste sur-tout dans les fleurs prêtes à s’épanouir, ou épanouies depuis peu, & qu’elle décroît graduellement à mesure que la fleur perd de sa fraîcheur ; la deuxième, qu’on n’apperçoit des signes d’irritabilité, que lorsqu’on applique immédiatement le stimulant à la partie dont on veut éprouver la sorte de sensibilité.

Voici encore quelques résultats principaux que ce savant naturaliste a tiré de ses nombreuses expériences.

1°. L’irritabilité végétale, comme l’irritabilité animale, ne se manifeste que dans les parties molles ; elle diminue peu à peu, à mesure que ces parties perdent leur souplesse ; elle disparoît enfin, quand elles ont achevé de se dessécher.

2°. L’irritabilité végétale est excitée par un stimulant, comme l’irritatabiiité animale.