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Cette presse est composée d’une table soutenue sur quatre pieds ; une rigole circulaire environne l’endroit où se place le fromage (Fig. 13) ; une planche, chargée de grosses pierres, est établie sur deux montans placés à une extrémité ; on la soulève de l’autre, & on l’arrête par le moyen d’une cheville qui se place dans les trous d’un troisième montant fixé à l’autre extrémité, (Fig. 16). On met le fromage dans le milieu de la table ; on abaisse dessus la planche supérieure chargée de pierre, en ôtant la cheville. Le fromage se resserre & se comprime par le rapprochement de la fescelle & de la guirlande qui entrent dans la feuille (Fig. 14 B). Le petit lait s’écoule par les cinq trous de la fescelle, & par les intervalles des trois pièces. On garde ce petit lait ; & comme il a dissous une certaine quantité de sel, il sert à humecter la surface des fromages qu’on garde à la cave.

Le fromage reste sous presse pendant vingt-quatre heures environ ; on le retourne ensuite dans le moule, & on l’y laisse encore quelque temps sous presse. On l’en retire pour le mettre sécher sur une planche à côté de la cheminée, afin qu’il puisse prendre un supplément de sel. Alors on le transporte dans la laiterie ou dans une cave, & on a soin de l’humecter avec le petit lait chargé de sel, dont j’ai parlé, lorsqu’on s’aperçoit que la surface est sèche : car, comme le sel marin est déliquescent, lorsqu’il a pénétré en quantité suffisante la masse du fromage, il se montre à la surface par une légère humidité. Ainsi l’état de sécheresse indique qu’il n’a pas eu assez de sel. On retourne les fromages tous les jours, en les essuyant avec la main, &, au bout de cinq mois de cave, ils sont faits.

On bat la crème qui s’est séparée du petit lait, comme je l’ai dit, dans un vaisseau conique, (Fig. 6 B) avec un bâton armé de deux planches en croix, (Fig. 17) ou d’une seule planche percée de trous en croissans. (Fig. 3) Dès que le beurre est séparé, on soutire le petit lait ; on le met bouillir, & l’on dégage par l’ébullition seule le fromage secondaire, sans le secours d’un acide. (Fig. 18) La partie caséeuse paroît moins adhérente au petit lait après l’extraction de la partie butireuse : on met ce fromage secondaire dans une serviette qu’on tient suspendue aux solives de la cabane.

IV. Fromage appelé de Bresse. Le procédé de ce fromage peut être mis en pratique dans tous les cantons, principalement lorsqu’on n’est pas dans le cas d’en faire une grande quantité. On prend dix à douze pintes de bon lait : après l’avoir coulé, on le met sur le feu dans une chaudière, où on le laisse acquérir assez de chaleur pour pouvoir à peine y tenir le bras nu. On y met ensuite une once de bon fromage détrempé dans un ou deux verres d’eau, dans laquelle on a délayé assez de safran pour donner une belle couleur au caillé, & de-là au fromage.

Lorsque le lait qu’on a mis dans la chaudière est suffisamment chaud, on brise le fromage avec un bâton bicanet, afin que la partie la plus onctueuse aille au fond de la chaudière, & se mêle ensuite. Cette opération faite, il s’agit de bien laver ses bras, & de pétrir la pâte de ce