les faire parquer. C’est ainsi que peu à peu on les accoutumera à toutes les rigueurs des saisons, & l’hiver suivant, ou le second hiver, les pères, les mères & les petits n’auront plus besoin d’aucun ménagement.
Il est reconnu, dira-t-on, que l’humidité est le fléau le plus cruel pour les bêtes à laine. La proposition est vraie dans toute son étendue, mais c’est l’humidité jointe à la chaleur, telle que celle d’une bergerie bien fermée, dans laquelle on laisse amonceler le fumier, & d’où on ne le sort qu’une à deux fois l’année. On ne niera pas que du fumier qui fermente, il ne s’élève beaucoup d’humidité, & qu’elle ne soit sublimée ou réduite en vapeurs par la chaleur. On ne niera pas que cette humidité ne soit âcre, puisqu’elle produit des cuissons aux yeux & des irritations dans le gosier, & par conséquent la toux à ceux qui y entrent, & qui ne sont pas accoutumés à respirer l’air vicié qui remplit la bergerie ; enfin on ne niera pas que la chaleur n’y soit très-forte, puisque j’ai vu des bergeries où la neige fondoit sur les tuiles à mesure qu’elle tomboit, tandis que le toit voisin en étoit surchargé.
Si on mène paître des troupeaux dans des pâturages humides, s’ils sont exposés à la pluie, enfin si on les ramène ensuite dans les bergeries dont on vient de parler, il est certain que la chaleur du lieu & celle de l’animal chasseront l’humidité de la laine, mais cette humidité s’évaporera, restera dissoute dans l’air de sa bergerie, & comme on ne lui laisse aucune issue pour s’échapper, elle augmentera encore & viciera l’air. Il n’est donc pas étonnant que l’animal souffre, pâtisse, dégénère & périsse ; mais au contraire s’il reste exposé à l’air libre, l’évaporation de sa toison se dissipera, & il respirera un air pur. Des troupeaux entiers sont sujets à être galeux ; la clavelée ou claveau, (Voyez ces mots) ou picotte ou petite vérole des moutons, est pour eux une maladie très-dangereuse, parce que cette maladie de la peau est répercutée par la chaleur dans la masse des humeurs. La gale est infiniment rare dans les troupeaux sans bergerie, & le claveau est pour eux une maladie sans danger ni suite fâcheuse.
Un troupeau parqué sur un sol humide, ajoutera-t-on encore, ou exposé aux grandes pluies, sera nécessairement exposé à l’humidité, & dès-lors sujet à un grand nombre de maladies. Il s’agit ici de s’entendre ; jamais on n’a conseillé de faire parquer les troupeaux dans des lieux bas ou aquatiques ; on doit au contraire réserver les lieux élevés & en pente pour le parcage, dans les temps humides. Les prairies sèches sont excellentes dans ce cas ; mais comme chaque jour on change les claies du parc, le piétinement de l’animal n’a pas le temps de convertir la terre en bourbier, & quand même il seroit dans cette espèce de bourbier, cette humidité lui seroit moins funeste que celle de la bergerie… Les pluies longues & fréquentes imbiberont la toison jusqu’à la peau de l’animal, & l’expérience prouve que lorsqu’elle est mouillée l’animal souffre. Je nie décidément la première supposition ; si on prenoit la peine d’examiner, on ne l’avanceroit pas comme une assertion démontrée. Exposez un