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lorsque tout l’ouvrage sera fini. C’est donc dans le cas seulement où il seroit impossible de se procurer du sable & des pierrailles, qu’il conviendroit de fouiller la totalité du sol. On pourroit encore éviter les trois quarts de la dépense, en portant sur ces allées, & avec la brouette, un peu de terre des quarreaux voisins ; alors les allées seront de niveau, ou, si l’on veut, plus élevées que le reste.

Supposons actuellement que tout soit disposé pour commencer les tranchées sur la longueur ou sur la largeur d’un quarreau. On commence par enlever la terre de la première fouille de trois pieds de profondeur sur quatre à cinq pieds de largeur, & on la porte à l’autre extrémité du quarreau. Les Brouettes (Voyez ce mot), sont très-commodes pour l’opération, d’ailleurs, elles peuvent être conduites par des femmes ou par des jeunes gens, dont les journées sont de moitié moins cheres que celles des hommes, & elles font autant d’ouvrages. On peut encore se servir de tombereaux ; mais je réponds, d’après ma propre expérience, que ce second moyen est plus coûteux.

La première tranchée ouverte, & la terre enlevée, les ouvriers commencent la seconde & en jettent la terre derrière eux, s’ils se servent de pioches ou de tels autres instruments à manches recourbés, en observant que la terre de dessus soit retournée & forme le dessous. Au contraire si l’ouvrier travaille avec la Bêche (Voyez ce mot) il va à reculons & jette devant lui & dans le creux, la terre qu’il souleve avec cet outil. Dès que le sol n’est pas pierreux, je préfère la Bêche à tout autre instrument, parce que la terre est mieux & plus régulièrement divisée, émiettée & nivelée. — L’ouvrier continue ainsi son travail, jusqu’à ce qu’il parvienne à l’extrémité du quarreau. Là il trouve la première terre transportée, qui lui sert à remplir le vuide formé par la derniere tranchée, alors le quarreau est complettement défoncé, & sa superficie se trouve de niveau.

Plusieurs particuliers couvrent de fumier la superficie du sol à défoncer. Je ne vois pas le but de cette opération, à moins que le terrein ne soit destiné à être tout à la fois & légumier & fruitier. Dans ce cas, l’engrais servira & favorisera l’accroissement des racines des arbres qu’on doit planter ; mais dans un simple légumier, les racines des plantes n’iront jamais chercher la nourriture à trois pieds de profondeur ; ni aucun travail, à moins qu’il ne soit semblable au premier, ne ramènera jamais plus cet engrais à la superficie. Si les tranchées ont été bien conduites, la terre de la superficie, une fois retournée, doit occuper le fond de la tranchée, & celle du fond le dessus.

Dans quel temps doit-on commencer à ouvrir les tranchées ? Cela dépend des saisons, du climat, de la nature du sol, & de l’époque à laquelle les ouvriers sont le moins occupés. Dans les pays méridionaux, il convient de commencer l’opération à la fin de janvier ou de février, afin que la terre ait le temps de s’approprier les influences de l’atmosphère & d’être pénétrée par la lumière & la chaleur vivifiante du gros soleil d’été ; quelques légers labours, même à la charrue, suffiront à la préparation des planches, des tables, &c., à moins qu’il ne soit survenu de grosses