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l’ordinaire du blé & d’autres grains. Les terres pour le surplus restent communément en jachères pendant trois, six & quelquefois douze ans ; ce qui facilite l’éducation des chevaux, des bœufs & de beaucoup de moutons.

Les bêtes s’y soutiennent mieux que dans le haut Maine, parce que tous les deux ou trois ans on les renouvelle par celles du Berry & du Poitou. La laine de ces régénérateurs, après un séjour d’un an ou de dix-huit mois dans le bas Maine, acquiert une qualité de laine haute, nerveuse, longue & soyeuse, d’où on tire le bel étaim, avec lequel on fabrique les étoffes si connues & si recherchées sous le nom d’étamine du Mans.

Le mouton de bonne race est ordinairement long de vingt-six à vingt-sept pouces, comme celui de plaine de la Bretagne & du Poitou. Les troupeaux ne parquent point, & leur laine chargée de toute espèce de saleté dans la bergerie, en est beaucoup altérée par le mélange avec le suint : elle donne au lavage, un déchet considérable.

L’Anjou est plus uni que montueux. Il y a deux sortes de moutons ; les uns viennent du Poitou, & les autres de la Sologne. Les bêtes qui arrivent dans ces deux provinces pour compléter les troupeaux, produisent des toisons composées de mèches plus longues, à mesure qu’elles se naturalisent dans les pâturages du pays. Les moutons du Poitou se soutiennent à tous égards ; mais ceux de la Sologne perdent quelque chose du prix de leur laine, qui devient plus ferme & plus fonde en s’allongeant.

Le Berry & la Tourraine. La Champagne du Berry est une plaine de quarante lieues de tour. Les terres cultivées ou sans culture se partagent en guérets, en jachères & en friches, dans lesquels on conduit les troupeaux, & en terres ensemencées, dont on a soin de les écarter. Les herbes tendres des guérets, prises en petite quantité, sont bonnes & nourrissantes : elles causent la pourriture ou les maladies de sang aux bêtes qui en mangent outre mesure, pour peu que la rosée les ait humectées.

On donne le nom de Bois-Chaud au reste du Berry, qui consiste en pays couvert de bois entremêlé de brandes ou landes, & de quelques prairies. Les herbes qui y croissent, forment une seconde branche de pâturage ; ils sont bien inférieurs aux précédens en finesse & en goût. Les bonnes landes sont une ressource habituelle pour les troupeaux de bonne qualité, & la lande maigre est le partage du mouton de petite taille, nommé de brandes ou de Bois Chaud.

Le Berry réunit à la faveur de ses pâturages variés, les différentes espèces de bêtes à laine. Les territoires de certaines parties ne sont propres qu’à former des élèves jusqu’à l’âge d’antenois ; dans d’autres ils ne font propres qu’aux engrais.

Les troupeaux considérés sous le rapport de leurs toisons, se divisent en fins, mi-fins & gros. On appelle moutons fins ou de Champagne, ceux qui paissent habituellement dans la plaine de ce nom. Les bêtes de cette première branche, longues de deux pieds neuf pouces à trois pieds, portent une laine fine & blanche, courte, serrée & frisée,