Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1785, tome 6.djvu/255

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tiers de cette mesure pour un enfant, d’une pinte & demi ou deux pintes pour un bœuf & pour un cheval.

On compose ces remèdes suivant l’indication de la maladie, soit afin de tenir simplement le ventre libre, soit pour redonner du ton aux intestins, soit pour calmer leur trop grande rigidité, causée par l’inflammation intérieure, &c. Si on donne le lavement trop chaud, le malade le rend presqu’aussi-tôt ; simplement tiède, il séjourne trop long-temps dans les intestins, & devient quelquefois nuisible. On connoît le degré de chaleur convenable, lorsqu’on applique la seringue contre la joue, & qu’on en peut supporter la chaleur. On fait en général trop peu d’usage de ce médicament : dans nombre de cas il peut suppléer tous les autres, & souvent il est unique dans son espèce.

Souvent l’idée ridicule de vouloir passer pour un savant compositeur de remèdes, a fait multiplier les drogues qui entrent dans la préparation de ce remède ; les plus simples & les moins composés sont toujours les plus efficaces, & l’on juge beaucoup mieux de leur manière d’agir.

Avant de donner un lavement aux bœufs & aux chevaux, il faut que le valet d’écurie frotte sa main & son bras avec de l’huile ; qu’il insinue sa main dans le fondement de l’animal, qu’il en retire les excrémens qui y sont endurcis ; qu’il recommence cette opération en enfonçant le bras aussi avant qu’il le pourra. Sans cette précaution préliminaire & indispensable, le remède ne produira aucun effet. Dès que l’animal aura reçu le lavement, on le fera trotter afin qu’il le garde plus longtemps ; autrement il le rendroit tout de suite. Si l’animal est trop malade pour courrir, on donnera deux lavemens de suite ; le second dès que le premier sera rendu, & même un troisième s’il ne garde pas assez longtemps le second.

Comme souvent dans les campagnes il n’est pas facile de se procurer une seringue proportionnée au volume de l’animal, voici le moyen d’en fabriquer une promptement & à peu de frais. Prenez un morceau de roseau des jardins. (Voyez ce mot) ou un morceau de sureau dont vous ôterez la moelle, long de six à huit pouces ; adaptez à une de ses extrémités une vessie, & fixez-la par plusieurs tours de corde. Elle formera une vaste poche dans le bas du tuyau. À l’extrémité supérieure du sureau, placez tout autour de la filasse ou du chanvre peigné, ou du coton, ou bien encore un morceau d’étoffe que vous assujettirez avec du fil, afin de former dans cet endroit une espèce de bourrelet qui empêchera que l’intestin ne soit blessé par l’introduction & le frottement du bois qui sert de canule. Le tout ainsi préparé, vuidez par le haut du tuyau a matière du lavement qui se précipitera dans la vessie ; introduisez cette espèce de canulle dans le fondement de l’animal ; de la main gauche soutenez la vessie, & de la droite, pressez fortement de bas en haut cette vessie. La pression forcera l’eau à pénétrer dans l’intestin de l’animal.

Le même instrument peut au besoin servir pour l’homme ; il suffit de diminuer la longueur & la grosseur de la canule. On peut encore mettre la dose convenable du lavement dans la vessie, & l’assujettir ensuite contre le sureau.