Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1785, tome 6.djvu/329

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

c’est-à-dire dans lequel les parties animales se développent par la fermentation ; il doit y rester en hiver pendant trois jours & trois nuits, suivant le degré de chaleur du fumier, & vingt-quatre heures pendant l’été. Cette seconde opération a pour but d’accélérer le commencement de putréfaction du chien, & de détruire sur-tout toute odeur que l’attouchement de l’homme peut lui avoir communiquée ; attachez une corde à l’osier qui lie les quatre pattes, & traînez cet animal par de très-longs circuits jusqu’à l’endroit le plus fréquenté par les loups ; alors suspendez-le à une branche d’arbre, & assez haut pour que le loup soit obligé d’attaquer le chien par le rable.

Le loup est un animal vorace qui ne se donne pas la peine de mâcher le morceau qu’il arrache, il l’avale tout-de-suite, & le poison ne tarde pas à produire son effet : on est sûr de le trouver mort le lendemain, & souvent il n’a pas le temps de gagner sa tanière.

Si on conseille de se servir d’un chien, ce n’est pas que cet animal ait une vertu particulière & plus capable d’attirer les loups que les autres animaux, mais comme le chien ne mange pas de la chair de chien, on ne craint pas que ceux du voisinage, pour l’ordinaire assez mal nourris, viennent dévorer l’appât, comme ils le feroient si on avoit placé une brebis ou une chèvre, &c.

On peut, comme on le voit, mettre ce procédé en pratique dans toutes les saisons & dans tous les jours de l’année, dès que l’on est incommodé par le voisinage des loups, cependant la meilleure saison pour l’employer est l’hiver, lorsqu’il gèle bien, parce que les animaux domestiques sont alors renfermés, & les animaux sauvages retirés dans leurs tanières, d’où ils ne sortent pas : ainsi le loup trouve très-difficilement de quoi assouvir son appétit dévorant, toujours augmenté par la facilité avec laquelle il digère ; alors l’animal est moins défiant, &, pressé par la loi tyrannique du besoin, il se jette indistinctement sur tout ce qu’il trouve.

Il est presque impossible, ainsi qu’il a été dit, de détruire complettement la race des loups en France, à cause du voisinage avec les autres pays ; mais il est bien facile d’en diminuer le nombre, & même de le réduire aux simples loups venant de l’étranger. À cet effet, l’argent que les intendans donnent pour chaque tête de loup pourroit être employé à l’achat de la noix vomique, qui seroit distribuée gratuitement dans toutes les paroisses ; chaque communauté seroit tenue de fournir les vieilles brebis ou les chiens, & le seigneur ou le curé du lieu seroient chargés de faire exécuter l’opération, & de la répéter plusieurs fois dans un même hiver. Je ne crains pas d’avancer que si l’opération étoit générale dans tout le royaume, & suivie avec soin & zèle pendant plusieurs années consécutives, on ne vînt à bout d’anéantir tous les loups.

On employe quelquefois dans la Camargue une méthode particulière pour prendre les loups, & qui mérite de trouver, place ici. On forme avec des pieux de quatre à cinq pieds de long, qu’on plante solidement en terre, à la distance chacun d’un demi pied, une enceinte circulaire d’en-