Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1785, tome 6.djvu/332

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ne pas entreprendre de la guérir. Dans le principe, il faut s’opposer à ses progrès ; pour cet effet, on a recours à une compression graduée, qu’on fait avec une plaque de plomb battu, qu’on ouvre des deux côtés pour avoir deux anses, à travers lesquelles on passe un ruban qu’on peut serrer au degré qu’on veut. Ce moyen est trop utile pour être négligé ; sa simplicité le rend recommandable ; je l’ai vu réussir, mais il n’opère pas de grands effets quand on l’emploie sur une loupe qui a acquis un certain volume. Il est alors inutile ; il vaut mieux lui préférer des remèdes fondans, dont l’application est plus propre à donner de la fluidité à la matière renfermée dans la poche de la loupe, & à en procurer plus aisément la résolution. Dans cette vue, on recommande certains emplâtres fondans, comme ceux de vigo cum mercurio, de ciguë, de diabotanum, de diachylum gommé ; l’application des linges imbibés d’urine, dans laquelle on a fait dissoudre du sel ammoniac, est un fondant très-énergique : je l’ai vu réussir. La terre cimolée des couteliers, les quatre farines résolutives, l’oignon de scille, les boues d’eaux thermales, précédés des frictions sèches sur la loupe, sont des remèdes trop énergiques pour qu’on n’obtienne pas de bons effets de leur emploi. Astruc recommande beaucoup la chaux vive paîtrie avec le miel & le savon, & appliquée en forme de cataplasme ; il prévient que ce remède cause des cloches qui incommodent beaucoup. L’emplâtre de tabac peut aussi très-bien convenir il est trop vanté par les auteurs pour ne pas y avoir recours.

Malgré l’application de tous ces fondans, on n’obtient pas la fonte ou la résolution de la loupe ; cette terminaison est assez rare ; il faut alors en venir à la cautériser, ou à l’extirper.

Rien de plus aisé que de cautériser une loupe ; cette opération est si simple, que, dans les provinces méridionales, il y a plusieurs guérisseurs de loupes qui réussissent fort bien, & qui appliquent le remède convenable avec toute la dextérité possible, quoiqu’ils soient paysans d’origine & de profession ; pourquoi ne pas faire part aux gens de la campagne de leur secret ? Plus sujets que les autres classes de citoyens à avoir des loupes, pourquoi ne profiteroient-ils pas des mêmes moyens ? Hâtons-nous de le leur indiquer, puisqu’ils peuvent l’employer d’eux-mêmes, & se le procurer à peu de frais. Pour cela, on applique sur la loupe un emplâtre qui la couvre dans son entier, & ouvert dans le milieu, de manière qu’on puisse placer dans ce vuide une ou plusieurs pierres à cautère de moyenne grosseur, qu’on recouvre d’un nouvel emplâtre, & qu’on fixe avec une ligature, de telle sorte que la pierre à cautère puisse ronger & brûler la peau & le kiste de la loupe. Après avoir laissé agir cet escarrotique pendant quelques heures, si le malade ressent une douleur très-vive, une irritation forte, vous enlevez l’appareil, & vous pansez la plaie avec l’onguent de la mère, matin & soir, jusqu’à ce que l’escarre & la loupe ayent entièrement disparus. Parvenu à ce point, (ce qu’on n’obtient qu’après une & même deux semaines, ou quelquefois plus tard) on pense la